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Hegemon : Contemptus Mundi

HEGEMON - Contemptus Mundi

Season of Mist/ Underground Activists, 2008

Black Metal, France

Album CD

Attendu depuis six ans, le nouvel opus des obscurs membres d'Hegemon est sorti de l'ombre en janvier 2008. Créée en 1996, la formation a toujours pris soin de rester à l'abri de toute médiatisation (elle possède toutefois un site myspace...). Huit concerts en l'espace de neuf ans (et une date en 2008, aux Pays-Bas), c'est dire si Hegemon se fait désirer. Mais, plus que la discrétion et l'anonymat, c'est la philosophie du groupe qui a forgé sa réputation. Depuis 2000, le groupe a engendré deux albums, en gardant en ligne de mire plusieurs impératifs : composer un black metal « traditionnel », être indépendant de toute influence (dans la limite du possible), et ne se focaliser que sur l'aspect musical de l'œuvre. Nous sommes donc à mille lieues du règne de l'esthétisme, qui parasite une musique originellement fondée sur la mise en exergue de l'absurdité de la condition humaine.

Six ans de travail, d'introspection et de calibrage. Il s'agit là d'une véritable pièce de maître...

Contemptus Mundi place l'homme au centre des compositions. Les quatre musiciens d'Hegemon y offrent une démonstration d'un black metal qui joue sur l'atmosphère pour évoquer le tempérament destructeur de l'humanité, le plus vif et saillant.

Si je devais me contenter - soyons bornés - de deux termes pour résumer cet album, je dirais que c'est un « concentré d'authenticité ». Je n'ai nulle envie de m'adonner à des comparaisons qui n'auraient pas lieu d'être. Pas de rapprochement donc avec les « puissants » et les « groupes-tyrans » du black metal, comme il est souvent coutume de faire, histoire de se la jouer critique littéraire. Le ressenti est tout simplement celui, poignant, d'une sombre profondeur. Pourtant, jamais les compositions ne versent dans « le » dépressif, ni dans le lancinant (sans connotation péjorative, chers amis sous Prozac). Quelques parties acoustiques ont été intégrées, et apportent une agréable légèreté à un titre comme \"Eli, Eli, Lamma Sabacthani\". Au début du même morceau, une voix tremblante et plaintive nous renvoie à la fois à un sentiment de peur et de désespoir. Un titre semble avoir fait l'objet d'une attention plus particulière. \"Aî Ibur Shapû\" revêt en effet une symbolique forte. Le titre évoque la cité perdue de Babylone, et par là-même, nous renvoie aux prémices des grands monothéismes, et au mysticisme dont est empreint la région.

Contemptus Mundi est un album arrogant, de par son professionnalisme, sa rigueur et sa justesse. Hegemon peut aujourd'hui se vanter d'avoir su se départir de pas mal de carcans stylistiques crasseux et immobilistes. Quand il parle de libertés individuelles, le groupe semble allier le geste à la parole, l'action à la ligne de pensée. Dans le milieu finalement très grégaire du métal extrême, Hegemon a su intelligemment se démarquer, en se forgeant une aisance peu commune. Sur la scène française, un des groupes les plus remarquables et indétrônables...Contemptus Mundi est une pépite, peut-être la meilleure de la première saison 2008. Rien que ça.

Myrha - 9/10