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Landskap : I

LANDSKAP - I

Iron Bonehead Productions, 2014

Progressive Doom Metal, Royaume-Uni

LP

Davantage qu'un simple courant musical, le Doom est une religion, un sacerdoce. Ce qui explique pourquoi ses prêtres vivent le genre de façon entière. Bien souvent, un seul groupe ne leur suffit pas, ne cessant donc de multiplier les lieux de culte pour y prêcher la bonne parole. Kostas Panagiotou fournit un bon exemple de cette passion qui anime, guide, ces esthètes de la douleur. Fondateur de PANTHEIST, figure tutélaire du Funeral Doom, l'homme multiplie ces derniers temps les hosties, entre celles d'APHONIC THRENODY(le EP (?) First Funeral et les split avec ENNUI puis FROWNING) et le Coronachs of the ? qui marquait le retour de WIJLEN WIJ, sans compter ce premier album de Landskap.

Monté en 2012, celui-ci réunit aux côtés du claviériste quelques mercenaires de la chapelle doom du vieux continent, dont - et pas des moindres - le batteur Paul Westwood (INDESINENCE et ex DE PROFUNDIS, TO-MERA), le guitariste et bassiste Frederic Caure (SERPENTCULT), sans oublier l'ancien chanteur de CENTURIONS GHOST. Avec à son bord une telle équipe de musiciens chevronnés, ce galop d'essai ne pouvait vraiment décevoir. Dont acte.

Finalement, la question que soulève ce dernier tient moins à sa réussite, évidente, qu'à sa teneur. Car, quoiqu'on en pense, le Doom est un style plus protéiforme qu'il n'y parait. Le pedigree de ses géniteurs laissait ainsi deviner sinon espérer une expression plutôt évolutive, pour ne pas dire progressive, que la présence de Kostas commande forcément, ses nappes de claviers dressant plus qu'un tapi mais le socle de ces compositions aux ambiances soyeuses.

Long EP ou court album d'une (trop) petite trentaine de minutes, ce jet séminal affiche une construction surprenante, basée sur quatre titres dont la moitié est en réalité instrumentale. Ce caractère participe naturellement de la dimension psychédélique de l'ensemble, que cultivent synthétiseurs duveteux, guitares plus stratosphériques que granitiques et chant empli de solennité. L'oeuvre est bordé par deux monumentales sentinelles. \"A Nameless Fool' ouvre l'écoute du haut de ses 12 minutes au garrot. Habillée d'une enveloppe sonore puissante et limpide (due à l'incontournable Greg Chandler), il s'agit d'une pulsation pesante et fragile à la fois portée par le voix claire de Jake Harding tandis que les guitaristes tissent une toile dont chaque fil est une note doucement mélancolique.

Fermant la marche, \"To Harvest The Storm\" déroule une trame vierge de chant d'une durée équivalente aux confins du rock progressif, partition jouissive sur fond de percussions délicates en forme de montée en puissance orgasmatique s'achevant en une éjaculation frénétique de six-cordes d'une déchirante beauté. Entre les deux s'enchaînent \"My Cabin In The Woods\", piste instrumentale nappée de sonorités cotonneuses, délicieusement psyché et exécutée avec beaucoup de finesse, puis \"Fallen So Far\" que fissure une superbe accélération. Les claviers y règne encore une fois en maître de cérémonie.

Faussement simple, cet opus à l'écriture ciselée et admirablement interprété, est un joyau cristallin qui se révèle un peu plus à chaque nouvelle écoute.

Childeric Thor - 8.5/10