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Mondrian Oak : Aeon

MONDRIAN OAK - Aeon

Eibon Records, 2012

Instrumental Post Doom Metal, Italie

CD

Le genre a été ces dernières années tellement siphonné, tellement vidé de sa substance, ainsi que de sa puissance et de sa beauté, par une kyrielle de traine-savates se contentant d'appuyer sur le bouton \"marche\" du photocopieur, que la méfiance est de mise lorsque qu'un groupe estampillé Post Metal pointe le bout de ses guitares. A fortiori quand est accolé à l'étiquette tant redoutée le vocable \"instrumental\". Encore un triste clone de PELICAN ou de RUSSIAN CIRCLES, se dit-on, souvent à raison.

C'est donc sans trop y croire, malgré ou à cause d'un premier album ( Through Early Seed ) que, reconnaissons-le, nous n'avons pas eu la chance d'écouter, que l'on commence l'écoute de Aeon , seconde offrande donc, de Mondrian Oak. Ils pourraient être Américains, Australiens ou même Français mais sont italiens, ces musiciens qui, inutile de tourner autour du pot plus longtemps, vont peut-être bien réussir à nous réconclier avec ce style où le médiocre le dispute trop avec la grâce.

Mais qu'a-t-il de plus cet album, que d'autres non pas ? Peu et beaucoup à la fois en fait. Peu car Aeon prend soin d'aligner comme des pinces à linges sur un fil la plupart des identifiants de l'instrumental Post Machin chose. Compositions fleuves, progression, riffs lourds, paysages sonores où se conjuguent respirations atmosphériques et puissantes envolées forment le substrat lessivé par les vents que d'autres disques avant lui ont fait souffler.

Mais là où trop de puceaux du son sans imaginations ne savent pas comment dépasser et encore moins transcender cette poignée d'invariants immuables, Mondrian Oak fait déjà montre d'une personnalité extrêmement affirmée dans la manière de couler son art dans les hauts fourneaux du Doom le plus terreux, chapelle avec laquelle il partage une même douleur désespérée, comme le démontre à grands coups de guitares corsées d'une gangue de tristesse et de glaise, la troisième piste de ce qui est conçu comme un bloc anonyme et indivisible, influence déterminante d'une musique dont on a l'impression qu'elle reste toujours accrochée au sol. Pourtant, aussi paradoxale que cela puisse paraître eu égard à cette gravité terrestre, il y a là un sens de l'espace et une manière de remplir celui-ci tout à fait étonnant. Du haut de ses douze minutes au jus et propulsée par des rouleaux de batterie se fracassant contre une falaise de guitare déchirante de beauté, le titre l'avant-dernier morceau illustre cette constante ambilalence entre l'air et la terre.

Mondrian Oak signe donc un grand disque de Post Doom astral ouvert sur l'Absolu. Superbe.

Childeric Thor - 8/10