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Scars From A Dead Room : Scars From A Dead Room

SCARS FROM A DEAD ROOM - Scars From A Dead Room

Distant Voices, 2014

Depressive Black Metal, Canada

CD

Quoiqu'on en dise, quoique qu'on en pense, le black metal se doit de conserver une part de mystère sinon d'anonymat. Il doit puiser dans l'obscurité, monde de ténèbres qu'il ne doit pas quitter, au risque de se perdre, de perdre ce qui lui confère des allures de trésors, de joyaux vénérés par une poignée d'initiés. Car l'art noir n'est tout simplement pas un genre comme les autres.

Scars From A Dead Room ne l'a pas oublié, créature obscure dont on ne sait quasiment rien et c'est très bien ainsi. Seul a filtré le fait qu'il soit le projet d'une âme solitaire installée au Canada, informations qui sont des indices précieux quant à l'essence de cette libation séminale. Misanthropique et hivernal, dépressive et glacial devrait donc être cet album. Ce qu'il est effectivement, rumination sinistre qui se nourrit du cadre géographique qui est le sien, froid et isolé, propice aux contemplations morbides.

Si Scars From A Dead Room creuse un sillon à priori bien connu, lessivé par beaucoup d'autres avant lui (ce n'est pas grave), il réussit pourtant l'exploit de se distinguer déjà du tout venant du black dépressif. En démarrant de manière abrupte avec le court Expiare, que précède l'inaugural Calvaire, plainte ambient suintant une humidité lugubre et dont la vélocité du tempo étonne, il brouille d'emblée les pistes. Il faut en réalité attendre Mes yeux s'ouvrant sur l'infini pour trouver dans cet essai ce que ses atours semblaient promettre, longue macération de plus de dix minutes au garrot que vrillent des accords répétitifs cependant que le chant, volontairement lointain, hurle des paroles qu'on devine minées par un mal-être absolu.

Mais là aussi, le rendu surprend car meurtri et perforé de vertigineuses crevasses qui le rendent fascinant (Inhume), à des années-lumière de la langueur monotone peut-être attendue. De fait, bien que plongé dans un abîme de désolation, l'album n'est pas ce qu'il a l'air d'être.

Il brise les codes du genre en préférant les canevas ramassés aux trames étirées, en jouant sur les diverses tessitures instrumentales (Temple Of The Morning Star, Tue le père. Tue-le), travaillant sur les voix, variant les tempos, parfois rapides (Exhume), le plus souvent lancinant (Il retourne à la terre). Et quand on croit en avoir fait le tour, un détail, un image, surgissent, marque des grands disques, ce qu'est incontestablement cet opuscule...

Childeric Thor - 7.5/10