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The Ruins Of Beverast : Rain Upon The Impure

THE RUINS OF BEVERAST - Rain Upon The Impure

Ván, 2006

Ambient Black / Funeral Doom, Allemagne

Album CD

NAGELFAR , vous connaissez ? Groupe d'origine allemande oeuvrant autrefois dans un Black Metal orchestral, teinté de paganisme dans la plus pure tradition du genre. Ca ne vous dit toujours rien ? Bien que la formation teutonne soit aujourd'hui inactive, deux de ses membres se sont éparpillés dans divers side projects, tous relatifs au genre Black Metal. Il serait toutefois assez ardu et vain de développer une liste exhaustive de ces derniers, un seul de ces projets nous intéressant actuellement : celui du batteur Alexander Von Meilenwald, répondant au doux nom de The Ruins Of Beverast .
Malgré son jeune âge, le projet dispose d'une discographie déjà relativement conséquente, elle-même dominée par une imposante paire d'albums. Le second de ces albums est ici à l'étude. Et, inutile de faire durer le suspense davantage, \" Rain Upon The Impure \" est un chef d'œuvre. Peut-être même, excusez ce soudain engouement, LE chef d'œuvre : un album portant le Black Metal à son apogée, et justifiant de par ce biais l'existence même de ce genre critiquable à plus d'un titre.

Le visuel de l'album aurait pu mettre la puce à l'oreille. Décrivant un vaste paysage charbonneux, à forte dominance de teintes noire et marron, l'atmosphère qu'il dégage décrit presque à la perfection les ambiances délétères enveloppant la musique. N'espérez toutefois pas y déceler le moindre détail sans une lumière adéquate. Le format, dans une moindre mesure, donnait aussi quelques indices sur la teneur de cette galette. 7 pistes, 80 minutes de musique. Si l'on ôte les deux courts interludes présents en son sein, \" Rain Upon The Impure \" propose des titres avoisinant la quinzaine de minutes chacun. The Ruins Of Beverast , comme beaucoup d'autres, étire sa musique à l'extrême. Mais l'homme fait partie d'une élite, celle qui sait tirer partie de la démesure artistique. Plus son champ d'action est large, mieux il se meut : si l'ambiance du précédent méfait longue durée, \" Unlock The Shrine \", savait captiver l'auditeur, celle de \" Rain Upon The Impure \" le pétrifie.

Sulfureux, suffocant. Eprouvant. Vicieux et rampant, \" Rain Upon The Impure \" vous happe sans crier gare. Ses ténèbres s'agrippent à vous sans aucune trêve. Les guitares se font sourdes et étouffées, lointaines, formant un ardent tapis sonore. Elles plantent le décor. A celles-ci viennent se greffer d'intenses percussions qui, claires et audibles, dictent la marche à suivre : l'utilisation d'un vrai drumkit en lieu et place d'une simple boîte à rythmes, couplée à un jeu relativement varié et en parfaite adéquation avec l'ensemble, permet au maître Meilenwald de porter l'œuvre à son summum. Et si la basse ne se montre que peu présente, ses rares interventions ne font qu'appuyer l'excellence musicale et le lourd climat de l'ouvrage.
Les claviers, plus ponctuels que chez les autres poids lourds du genre et accompagnés de temps à autres par des choeurs et autres samples, amènent à une autre interprétation de l'univers dépeint par le one man band allemand. L'homme relève la tête et reprend soudainement le dessus. Dans un ultime regain de force et de ténacité, son lourd fardeau devient l'espace de quelques instants une extraordinaire épopée.

Mais qu'importent les longues phrases, puisque l'album se résume en un mot. Ou plutôt, \" Rain Upon The Impure \" résume à lui seul un concept. L'artiste lui-même semble s'être laissé absorber par son œuvre. Sa propre musique s'est emparée de lui, pour une densité que nul autre ne peut prétendre créer.
\" Rain Upon The Impure \" est la densité à l'état pur. La musique qu'il renferme s'étale, et prend possession de tout l'espace sonore. Elle se répand inexorablement sans qu'aucune perturbation extérieure ne vienne entraver sa progression. Elle vous coupe du reste du monde, prend part de votre être et ne s'en sépare qu'une fois l'écoute achevée. L'œuvre dépasse dès lors la simple notion de musique : à la base simple distraction auditive, il devient une expérience à vivre.

\" Rain Upon The Impure \", ou un voyage transcendantal dans les abysses de l'âme et les méandres de l'esprit. L'album n'est certes pas des plus évidents à aborder ; l'artiste a pris toutes les mesures nécessaires pour développer ses ambiances, et a inévitablement perdu l'accessibilité musicale en cours de route. Mais ce joyau d'Art Noir mérite amplement qu'on lui consacre plusieurs heures d'écoute, aussi infructueuses et frustrantes puissent-elles être. Le périple n'en sera que plus intense.

Krieg - -/10