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Unformulas : Post Mortem Visionary

Aftermath Music, 2022

Doom Death, Suède

Album CD

S'il n'a jamais cessé d'être actif, bien au contraire, entre The Funeral Orchestra, Saltas, Domedag ou Gravfraktal et sans compter ni la résurrection de Runemagick et tous ses autres projets désormais dans la tombe (Heavydeath), le fait est que nous avions un peu délaissé la carrière de Nicklas Rudolfsson depuis quelques années. A tort. Evidemment. Son nouveau groupe baptisé Unformulas ne vient pas seulement nous rappeler à notre bon souvenir cette figure culte de la scène death/doom suédoise, il démontre avant tout deux choses.

D'une part que le vétéran (il approche la cinquantaine) a décidément le genre chevillé au corps, fidèle à un son à la fois primitif et charbonneux qui n'appartient qu'à lui et dont il ne se départira sans doute jamais. Ce qui tombe bien puisqu'on ne le lui demande pas ! D'autre part qu'il ne se montre au final jamais aussi inspiré que lorsqu'il fouille les boyaux tentaculaires d'un death metal obscure et cyclopéen. Dont acte.

Etonnamment, alors qu'il y assure à peu près tout, des instruments à l'écriture, Nicklas ne chante pas dans Unformulas, rôle qu'il laisse à David Nilsson (Feral), ce qui n'a aucune influence sur la teneur de Post Mortem Visionary qui porte incontestablement sa griffe, immuable, indélébile et donc reconnaissable entre mille. Sans (mauvaises) surprises, ce premier signe de mort est du Rudolfsson pur jus. On reconnait ces guitares minérales qui claquent comme un ressac souterrain, ces ambiances de cryptes méphitiques, de caveaux telluriques, cette façon de tricoter des instants pétrifiés au-dessus d'un puits sans fond qu'aucune lumière n'atteint, de dévider une trame morbide jusqu'à la rupture. En ce sens, Unformulas n'est pas si éloigné que cela de Runemagick avec lequel il partage cette même appétence pour les tempos prisonniers d'une gangue rocailleuse dont ils ne parviennent jamais vraiment à s'extraire ('The Head With The Rotten Tongue').

Mais contrairement aux offrandes de son aîné, Post Mortem Visonary baigne dans un climat plus horrifique, plus vicié encore, auquel participent incontestablement les vocalises caverneuses de David Nilsson ('Uncontrolled Unformed') ou celles de Rasmus Kvist (Gravkväde) sur le terminal et définitif 'Near Death Experience (Serpent Unleashed)' qu'il plonge dans une folie démentielle. Un soin tout particulier a d'ailleurs été accordé au chant, lead ou backing, masculin ou féminin (Rebecka Strågefors et bien sûr la propre femme de Nicklas, Emma Rudolfsson) que le maître des lieux a confié à plusieurs invités qui chacun vient enrichir cet édifice lovecraftien dans sa dimension cauchemaresque et étouffante, lequel se dresse dans toute sa noirceur abyssale, dans les profondeurs de la terre. Chaque titre a quelque chose d'une marche qui l'enfonce inexorablement dans cet abîme peuplé d'effroyables créatures tapies dans ses entrailles depuis la nuit des temps.  

Réceptacle d'un death doom obscur et cyclopéen, Post Mortem Visionary répand des images de mort qu'il égrène avec cette sévérité morbide propre à un Nicklas Rudolfsson toujours aussi inspiré.

Childeric Thor - 8/10