Religion
Le journal Lyon mag mis en examen pour avoir rapporté les propos de l'Imam de Vénissieux.
Expulsé le 21 avril 2004 par le ministère de l'Intérieur, l'imam Abdelkader Bouziane est revenu en France le 22 mai. La décision du ministère de l'Intérieur avait été cassée le 22 avril par le Tribunal administratif de Lyon. Revenu en France, l'imam a été mis en examen le 3 juin pour "complicité d'apologie de crime et de provocation à porter atteinte à l'intégrité d'une personne". Mais, conséquence aberrante de la loi sur la presse de 1881, le journal Lyon Mag' qui avait rapporté ses propos dans son numéro d'avril 2004 a lui aussi été mis en examen pour un motif similaire : "apologie par écrit de crime" et "provocation directe, non suivie d'effet, à porter atteinte à l'intégrité d'une personne" !
On se pince pour y croire : rapporter des propos pour les condamner devient répréhensible, au même titre que celui qui les a tenu ! Dès lors, comment dénoncer les déclarations de l'imam sans même les citer ? La mise en examen de Lyon Mag' révèle l'abîme qui sépare certains juges d'instruction de la logique et du bon sens (l'excellent documentaire de Raymon Depardon "10e chambre, instants d'audience" en fournit une autre illustration). Peut-on de façon crédible dénoncer Le Pen et son "détail de l'histoire" sans le citer afin de ne pas s'exposer à la répression d'une justice absurde ?
En poursuivant le raisonnement, traduire le Coran, et la Bible, deviendrait un exercice extrêmement périlleux : quel sort réserver à Gallimard, Maisonneuve et Larose ou Flammarion quand ceux-ci traduisent, impriment et diffusent la traduction du fameux verset 34 de la sourate 4 où le mari reçoit l'injonction "divine" de frapper sa femme ? Les éditeurs sont-ils voués à une mise en examen expéditive ? On ne peut que s'alarmer, et être extrêmement inquiet, quand une justice capable d'une telle méprise et de tant de cécité dispose du pouvoir de décider qui peut s'exprimer et en dicter le contenu. Plus que jamais, la liberté de la presse est le pendant nécessaire à l'exercice abusif de tout pouvoir.