La Horde Noire Webzine metal extrême depuis 2002

Le seul problème avec les mots, c’est qu’ils n’ont pas le même sens pour tout le monde...

Société

Tentative de rhétorique trollesque, de bric et de broc

Chers lecteurs et amis de la Horde Noire,

Eh oui, votre Troll préféré est de retour, huh huh huh. Aujourd’hui, je change un peu de registre, pour vous entretenir quelque peu de « rhétorique ». Vous vous en êtes sans doute rendus compte, au gré de conversations avec différentes personnes de votre entourage, ou avec n’importe quel péquin croisé dans la rue, les mots ont toute leur importance. Le sens qu’on leur accorde, encore plus. Et, je me suis aperçu, de par mon vécu assez chaotique ainsi que du fait de mon statut d’autiste Asperger (eh oui, il en faut), que je me demandais souvent si je parle la même langue que les gens que j’ai parfois le malheur de croiser...

Dans le sens où, même en tant qu’amateur de Metal extrême (Pagan/Folk/Black/Death...), habillé en tant que tel chaque jour que les Dieux font, Païen revendiqué et n’ayant aucune gêne à m’afficher ainsi, j’ai de temps à autre la désagréable impression que « les gens » (une entité assez vague, finalement) ne comprennent rien à mes tournures de phrases assez alambiquées et au vocabulaire que j’emploie. Et qu’ils comprennent encore moins le sens réel de certains mots pourtant plus que communs – mais relativement galvaudés – alors même que ce sens réel et ses développements ont une teneur telle qu’il m’est possible de soutenir une conversation durant une heure, ou de vous pondre une de mes modestes tribunes. Comme j’ai coutume de le penser dans mes moments de désillusion et de cynisme, « les gens sont des cons ».

Commençons ensemble, si vous le voulez bien, par le mot « culture ». Oui, si je vous dis « culture », vous y associerez sans doute des mots comme « livre », « lecture », « art », « musique », « critique », « patrimoine », « langue », « dialecte », « vocabulaire », « cinéma », « théâtre »,... Mais, dans notre pauvre pays, le mot « culture » a été tellement détourné de son utilisation d’autrefois, tellement déprécié, tellement perverti même, que des « masses » en viennent à désigner par ce mot la moindre émission minable de « télé-réalité », le moindre roman de gare terminus (avec des herbes qui poussent sur les voies faute de trains), les vidéos les plus racoleuses (pour ne pas dire « putaclic ») d’un Youtubeur, etc. Le tout, on s’en passerait bien, en fait, en tant qu’Outsiders assumés. Car ce n’est pas notre conception du monde, ce ne sont pas nos idéaux, cela ne représente rien de ce que nous sommes, et pour tout dire, ce n’est pas notre définition du mot « culture ».

Ah, bien sûr, les grands esprits de la bien-pensance contemporaine érigée au pinacle des valeurs de « tolérance » et d’ « acceptation » soupirent que « tous les goûts sont dans la nature » (donc, les canettes de boissons énergisantes abandonnées dans la forêt, c’est normal ?), que « il en faut pour tous les goûts », que « il faut que ça plaise à tout le monde », ad nauseam. Oui, mais en fait, pas du tout ! Si ça ne ME plaît pas, si je ne trouve pas ça intéressant ni digne de faire frétiller la presse ou d’embraser la « Twittosphère », si je trouve ça d’une idiotie consternante, d’une négation totale du bon sens, par définition, ça ne plaît pas à tout le monde ! Comment voulez-vous ne pas vous sentir profondément différent, voire élitiste, au milieu d’une horde de zombies partageant le QI d’une seule huître, qui ne trouvent jamais rien à y redire, et qui imposent leur putain de norme autant que faire se peut ?

Eh oui, chers amis. Durant l’enfance des gens de la génération de mes parents, la culture venait des livres, de la radio (pour les familles qui en possédaient une), la télé n’est pas arrivée dans tous les foyers en même temps. Chacun se construisait ses idées, ses opinions, en lisant, de par son vécu, de par les infos concises et brèves qui arrivaient. La culture, c’étaient aussi des loisirs aujourd’hui « passés de mode », la philatélie par exemple – pour pas cher, on avait des timbres de pays lointains, on ouvrait le dictionnaire, on se cultivait, ni plus ni moins ! Depuis les années ‘80, et c’est un trentenaire qui vous parle, les télés, les radios, les journaux (sauf de rares exceptions) sont littéralement tartinés de ce qu’on appelle la « culture populaire ». Du consommable, pas fait pour durer, mais conçu dans les boîtes de production pour contenter les suivistes en chef comme les moutons en serfs. De la bouillie, composée avec le cul tout autant qu’écrite au kilomètre, sans aucun souci de démarche artistique. Oh, bien sûr, il y a eu des exemples dans le Metal, comme auparavant dans le Rock (un autre mot hélas employé à tort et à travers !), nous les connaissons tous.

Logiquement, je continue par le mot « musique ». Inutile de dégoiser longuement, vous avez compris où je veux en venir... Il est plus que certain que, si les médias Français dans leur immense majorité n’avaient pas porté la pop mièvre, le rock prépubère et boutonneux, le rap « céfran » et le r’n’b « actuel » au panthéon où ces saloperies se pavanent aujourd’hui, nous aurions encore droit à la recherche de la beauté en toute chose, la quête d’un certain absolu, le jaillissement d’idéaux et de messages ayant une portée philosophique ou au moins, entraînant l’esprit critique, le raisonnement, l’introspection et l’amour de la curiosité intellectuelle ! Mais non, miledieu de catsalh de macarèl de hilhdépute de dioù-biban que je suis con... Il ne faut surtout pas instiller ces « idées dangereuses » dans le cerveau de chaque consommateur... de chaque citoyen, pardon, ça m’a échappé.

Autre mot, à utiliser avec d’infinies précautions ces temps-ci, le mot « humour ». Il y a pour ainsi dire autant de styles d’humour que d’humoristes. Bien évidemment, le problème est que non seulement des blagues qui étaient parfaitement admises il y a 30 ou 40 ans finissent au tribunal aujourd’hui (la « justice de Twitter » en a décidé ainsi, merci aux SJW qui feront l’objet d’un futur réquisitoire Trollesque), mais d’autre part, quand Groland ne passionne plus autant qu’il y a 15 ans avec ses hallebardes puissamment trash qui écorchent la décence, Hanouna réussit fort bien à faire pouffer trois millions d’hydrocéphales en jouant avec des nouilles dans un calcif. Pierre Desproges et Coluche, entre autres, seraient littéralement furieux s’ils étaient encore parmi nous. Jean Yanne aussi, à coup sûr, ainsi que tant d’autres chansonniers qui y allaient d’histoires plutôt lestes dans l’ancienne version des « Grosses Têtes ». Dieu qui me tripote, prends donc Hanouna et Kev Adams, et rends-nous nos humoristes préférés ! Rends-nous Gotlib, Choron, Bizot, Cabu, Tignous, Charb, Desproges, Coluche, Le Luron, Pierre Dac, je t’en conjure. Je peux toujours prier dans les pissotières et pisser dans les bénitiers... ça ne changera rien.

L’humour est devenu globalement, comme le reste (à une ou deux exceptions près), une gigantesque usine à suivistes dont le but n’est autre que de « ne pas se prendre la tête ». Quelle tristesse de voir l’humour d’une langue Française si riche, si prolifique en jeux de mots, calembours et blagues parfois légères comme un parpaing, s’effacer peu à peu face à l’anglais branchouille de la « macro-économie », chère aux « disrupteurs » qui s’enfilent des hectolitres de mélanges de jus de fruits à la con chaque année, face à un ordinateur portable, le cul posé sur un pouf bariolé pour « pitcher leur buisness plan ». Ceux-là sont parmi les plus détestables de tous. Ils croient être les rois du monde, mais allez leur couper le Wifi et ils ne seront plus rien du tout !

Si je vous dis « combat », vous pensez sans doute « épée », « bouclier », « hache », « arc », « donjon », « masse d’armes », « cimeterre », « Viking », « Alésia », « Gergovie », « baston », « Crôm » peut-être... sait-on jamais, certains d’entre vous sont ou étaient possiblement fans de littérature Fantasy. On utilise aussi ce mot pour désigner une lutte contre la maladie, par exemple, ou un duel politique, c’est vrai. Pour ma part, je l’utilise dans un sens « figuré », c’est à dire que je n’ai pas honte de parler de « combat culturel au quotidien » pour définir cette ténacité qui est la mienne à porter haut et fièrement la musique Metal, me montrer digne, en tant qu’être humain libre et droit dans ses Rangers, attaché à ses idéaux et à ses rêves de simplicité, déterminé à ne pas céder un pouce à la « norme » maudite. Et encore plus : pour tout dire, plutôt être foudroyé par les Anciens Dieux si je « paraphe » un jour le sinistre « rêve pavillonnaire » garni de crédits ! Je n’ai pas l’intention de renoncer à tout ce que j’ai été ! Pour le sens que j’associe au mot « combat », je n’ai nul besoin de quelque arme que ce soit : le verbe, la répartie, ma dégaine et mon gabarit suffisent à « questionner » le brave mouton, et à l’effrayer quant à ma possible réaction s’il en vient à me provoquer. Que les Dieux me préservent de devoir invoquer la Force de Crôm, la Baston bien sûr !

Oui, nous autres Metalleux, tout autant que les Goths authentiques, les Travellers, les derniers Punks et Hippies, nous luttons au quotidien. Pour le droit d’être ce que nous sommes, pour le droit d’être dignes, pour le droit d’aimer nos cultures respectives, pour le devoir d’honneur que cela implique. Ainsi que pour le sentiment de droiture légitime. Parce que c’est ce qui fait de nous ce que nous sommes. Finalement, nous avons totalement le droit – quant à moi, je le prends comme un devoir moral – de sourire franchement à chaque personne nous reprochant notre look (et donc, nos références culturelles) par un regard en biais ou appuyé. Mais un sourire qui veut clairement dire « Je t’emmerde, et j’emmerde tout ce que tu représentes, si tu n’as rien de mieux à faire, retourne donc payer tes crédits. »

(Eh oui, pour moi, dire « retourne donc payer tes crédits », c’est une insulte !)

Et, vous commencez à me connaître, le dernier mot que je traite est le mot « liberté ». Là, je me ferai plus rentre-dedans encore : la liberté est soit une destinée fidèle que l’on épouse dans le but d’exister pleinement en dehors de toute influence, quitte à vivre vite et mourir sans aucun remords en ayant fait ses expériences, soit une pute à franges que l’on farde à volonté pour camoufler la soumission inhérente au « modèle de société » débité à la journée longue par la pub’ et instillé dès l’école primaire. Ah oui, je n’y vais pas par quatre chemins. Mais voilà, on met aussi ce que l’on veut avec le mot « liberté », que ce soit à la suite de ce mot, ou dans son sens le plus profond.

La liberté de payer comptant ou à crédit trompetée à tort et à travers dans les réclames, n’est-ce pas la liberté de se soumettre ? La liberté d’être propriétaire, brandie comme argument de vente d’un putain de pavillon hideux, clés en main, n’est-ce pas un dévoiement du sens originel de ce mot ? La liberté d’expression, n’est-ce pas une formidable tribune offerte aux plus abrutis des pécores à moitié consanguins, pour baver sur tout qui n’est pas « normal », tout ce qui est « différent » de leur petit monde – qui est le « monde de tout le monde ou presque » dans ce pays gangrené par l’agenouillement – et par extrapolation, ce qui n’est pas « normal » n’est-il pas « suspect » ? Qui préserve un Metalleux ou un Goth de ne pas être suspecté de faits aberrants, au seul motif de sa dégaine ou de la musique « violente » qu’il écoute ?

Quant à la liberté de la presse, qui est en mesure de nous garantir que ce n’est pas le cache-sexe d’un bourdonnement de connards qui se tournent autour en s’autorisant des trucs, qui ne varient jamais d’un iota dans leur vénération pour la « culture populaire » actuelle, qui se vautrent dans leur ego de prescripteurs de culture ... A défaut de proposer réellement un tout autre modèle de société que celui où des marchands d’armes, de béton, de pétrole possèdent les titres les plus vendus, et « donnent la direction » à suivre, au risque, pour celles et ceux qui s’en écartent, d’être vus et catalogués comme parias ? Ce qui n’empêche pas, pour certains, de concocter de formidables trolls hors catégorie en annonçant trois fois par an des dossiers « spécial assistés » tout en palpant de généreuses subventions d’état... au titre de la liberté de la presse, Dieu me tripote encore une fois !

Vous voyez, chers lecteurs et amis de La Horde Noire, les mots et le sens exact que l’on leur donne ont toute leur maudite importance en tabarnac. Il faut en prendre conscience, pour être le plus clair et le plus explicite, et surtout, pour ne pas brader ses propres idées. Et encore moins ses propres idéaux et ses rêves.

Honneur et Tradition à vous tous.

Krähvenn « Darkspear » Wolfstone des Allobroges, mercenaire Troll des Clans de l’Est, en exil