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Interview Paape

Bandes dessinées

Paape

C'est au cours de la fête de la B.D. de Talloires (Haute-Savoie) des 23 et 24 novembre 2002 que l'on m'annonce que Paape, personnage 'historique' de la B.D. belge, est prêt à répondre aux questions de la presse et du public ; nous sommes évidemment au rendez-vous et une conversation à bâtons rompus s'engage...

Dites-nous comment tout a commencé pour vous :

Par hasard ! Peintre de formation d'origine liégeoise, j'ai rejoint en 1945 la boite CBA, installée à Bruxelles pour donner des cours de dessin animé. Elle recrutait pour remplacer son ancien personnel passé à la B.D. et reprendre les personnages.1965 est l'année de mon arrivée aux Editions Lombard avec Greg, pour créer le personnage de Luc Orient. Nous sommes parus dans Pilote, Tintin, Spirou?il y a dix-huit albums à ce jour. J'ai participé aux premiers cours de B.D. donnés en France en 1968 et Plantu fut mon élève ! Je totalise cinquante sept années de carrière !

Quelles ont été vos idées orginales ?

Elle furent variées : j'ai créé plusieurs personnages comme Jean Valhardi, Marc D'Acier, Oncle Paul ; j'ai même dessiné pour la pub?Il y a eu des policiers, des aventuriers, des marins et même une biographie de Churchill !

Est-il facile de se renouveler, de s'adapter à de nouvelles générations de public ?

Oui, mais il faut de l'imagination ! Un jour, à propos de mes dessins, un architecte me demandais :'mais ou est donc votre ligne de fuite ? ' Je lui ai répondu : 'il n'y en a pas !' Les règles académiques m'ennuient. Quand j'ai débuté, je devais faire du remplissage dans un journal, sans blanc ; mais maintenant, je travaille d'abord pour moi, avec un public changeant, il est vrai. Je travaille dans l'abstrait. En fait, l'avis du public est peu important.

Quel est votre héros préféré ?

Cela dépend de la série sur laquelle je travaille dans l'immédiat ! J'adore celui que je suis en train de dessiner !

Et vos auteurs préférés ?

Je ne lis plus de B.D. car il y en a trop, et de tous pays ! Ce serait trop cher et trop encombrant ; j'ai d'ailleurs liquidé cinq cents albums ; Lombard nous offrait une caisse de mille cinq cents albums chaque année : J'avais besoin de faire de la place ! Pourtant, leurs dessins sont souvent extraordinaires. Par contre, j'adore le copinage et j'en ai de bons souvenirs. Par exemple, j'ai ajouté des barbes et des chapeau à des personnages dans Spirou?.
Quelle est votre cadence de travail ?
A la grande époque, je fais deux albums par an, ainsi que tout le travail autour : pub, illustration ; on faisait tout en même temps, mais où trouvait-on le temps ?

Comment qualifiez-vous votre style ?

Je n'ai pas connaissance d'avoir un " style " proprement dit; pour moi, il y aurait trois style : le caricatural, le semi-caricatural et le réaliste. Mon dessin est réaliste, près de la nature, avec des ombres portées, et ne se résume pas aux contours.

Peut-on parler du fameux " trait clair " belge ?

Ah ! Le trait belge ! Les dessinateurs changeaient parfois de ville ! Par exemple, l''école de Marcinelle' (proche de Charleroi) travaillait pour Dupuis. Alors, le trait belge?

Aimiez-vous collaborer pendant l'élaboration d'un album ?

Je ne faisais que le dessin et j'ai toujours travaillé avec des scénaristes confirmés : Delporte, Greg (j'aime son dessin précis), Charlier (dessinateur à l'occasion, c'est en fait un littéraire), Duchâteau (qui est un écrivain)..

Avec le recul, comment expliquez-vous votre longévité ?

Je suis toujours étonné de voir le monde qu'il y a quand je viens ; quand il n'y aura plus personne pour moi, je servirais de faire-valoir à des salons ? Je n'aurais alors plus d'utilité, je serais le doyen !

Quelle est votre actualité ?

La poste belge a fait un timbre à mon effigie ! En outre, je viens de sortir un petit album, dont les planches traînaient depuis quarante ans : il s'appelle 'Le porte-bonheur', et son éditeur est allemand.

Et pour terminer, quels sont vos projets ?

Faire quelques séances de dédicaces (vingt en 2002, surtout en Europe de l'Ouest, quand on m'invite) et continuer à vivre quelques années ! Actuellement, je n'ai pas d'album prévu ; j'attends des propositions d'éditeurs, mais actuellement, ils manquent singulièrement de moyens. Les auteurs ne connaissent plus les éditeurs, qui sont des conglomérats ne privilégiant que le rendement. Beaucoup de maisons ont fait faillite, des planches et des personnes ne sont pas payées...

Merci pour vos réponses et bonne retraite à vous !

Par Autocrator, dec 02