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La question religieuse au XXI°S. Géopolitique et crise de la postmodernité

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Livres Essais

Georges Corm
La découverte
2006
200 p.

L'auteur est universitaire (économiste et historien) et consultant dans des organismes internationaux. Appuyé sur une solide base historique, il nous dévoile dans un langage très accessible son point de vue sur la résurgence du fait religieux dans le champ politique.
Agacé par le regain d'intérêt pour le religieux, cette tendance lourde viendrait selon lui des élites intellectuelles européennes et américaines, anciennement marxistes, et déçues par la mort des idéologies politiques. Ces élites, en réaction, deviendraient du coup anti-révolutionnaires et néo- conservatrices, ouvrant la boite de Pandore aux revendications à base religieuse, vues comme un "retour aux sources" salvateur face à une globalisation inquiétante. Le religieux, jamais réellement terrassé, serait poussé à s'engouffrer donc dans le vide laissé par la crise de légitimité des démocraties.
Pourtant ces activistes religieux (de Ben Laden à G. Bush) sont plutôt au service d'intérêt politiques et économiques fort profanes et se serviraient de la religion comme levier. La laïcisation contemporaine avait fait oublier un peu vite à l'Europe la puissance formidable du religieux. Elle avait oublié et refoulé la violence née des guerres de Religion au XVI°S., et rejeté l'invention de la violence et de la dictature sur la Révolution française et sa Terreur de 1793.
Pour le prouver, il se plonge brillamment dans l'histoire des liens entre le politique et le religieux, dans les trois monothéismes, afin de montrer que le premier instrumentalise toujours le second, et commet les pires violation des droits de l'Homme.
Selon lui, il faudrait de replonger dans le patrimoine des Lumières et répandre la République à l'échelle internationale pour rompre la spirale de l'intégrisme et de la violence religieuse. Son propos offre parfois d'étonnants raccourcis (ex-marxistes=néo-conservateurs actuels), et il n'hésite pas à attaquer une certaine école de pensée dite "de droite" qui avait su désacraliser la Révolution (et ses dérives, de 1793 à celle de 1917) depuis les années 1970. Il ne propose donc qu'un point de vue intellectuel parmi d'autres, celui peut-être le plus en vogue chez les intellos français. Pourtant, sa description de l'utilisation de la religion à des fins politiques nous font réfléchir à ce qu'est une nation, un peuple, une identité, une religion. Des notions passionnantes qui permettent de mieux saisir les tensions mondiales actuelles, et de se forger sa propre opinion.

Autocratôr