Poésie
Un visage à faire reculer d'horreur, tel était le visage que l'homme qu'isolait dans l'autobus archi-comble,un espace comme interdit. Au milieu de cette figure atroce, rongée par la guerre ou la lèpre, deux yeux d'une extraordinaire douceur fixaient un invisible horizon au-delà du magma humain apeuré, vaguement hostile, qui s'ouvrait devant eux. Tous, en voyant venir le moment où le receveur devrait s'approcher de lui, le toucher peut-être, étaient envahis par l'angoisse, une angoisse indéfinissable. Mais quand il n'y eut plus qu'un voyageur sans billet, des vêtements de ce voyageur sortit une main d'une absolue blancheur et porteuse, on eût dit, d'un viatique. Alors, seulement un soulagement, une véritable paix, se répandit sur chacun. Tandis que la voix, venue de quelque part derrière la pourriture de ce visage, prononçait avec une angélique suavité ces paroles: Un aller pour l'Etoile .