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Contes Cruels

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Romans, Nouvelles & Théâtre

Auguste de Villiers de L'Isle-Adam
1883
280 p.

Imaginez un rédacteur en chef qui exige la plus absolue médiocrité de ses collaborateurs, un notaire qui veut organiser un dîner plus beau que le plus beau dîner du monde ou un comédien qui incendie un immeuble habité pour pouvoir mieux appréhender le concept de remords.

Un peu plus loin, vous croisez deux jeunes tourtereaux dont la seule préoccupation est l'argent alors qu'un veuf inconsolable ressuscite de sa seule volonté son épouse pour une nuit.

S'en vient ensuite une cohorte de savants fous qui peuvent vous débarrasser de vos rêves et aspirations, vous fabriquer artificiellement de la gloire ou utiliser la voûte céleste pour vos campagnes publicitaires.

Et encore, tout ceci n'est qu'un échantillon de ces 28 contes cruels.

Les « Contes cruels », parus en 1883, sont la compilation des divers écrits publiés par Auguste de Villiers de L'Isle-Adam dans la presse de son époque.

Villiers de L'Isle-Adam est quelquefois considéré comme à l'intersection de Jules Verne et d'Edgar Poe. Le mélange entre Jules Verne et Edgar Poe n'est pas aussi saugrenu qu'il y paraît de prime abord lorsqu'on sait que Jules Verne a écrit une suite (Le Sphinx des Glaces) à un roman d'Edgar Poe (Les Aventures d'Arthur Gordon Pym).

Comme Jules Verne, Villiers intègre la science dans son imaginaire. Mais alors que Jules Verne y cherche des possibilités de développement, Villiers se montre plus méfiant et, par l'absurde et l'ironie, cherche plutôt à en révéler les limites. Dans des textes faussement enthousiastes, il démontre les bienfaits d'inventions loufoques ou absurdes. Dans certains cas, Villiers n'est pas si loin de notre réalité (la machine à gloire par exemple).

Avec Edgar Poe, Villiers partage le goût du macabre, de l'horreur et de l'occultisme: on y voit un millionnaire sadique soudoyer un bourreau pour prendre sa place lors d'une exécution, un jeune homme communiquer avec un prêtre mort, un avocat exécuté à la place de son client, etc. Les critiques estiment que Villiers est, avec Maupassant, l'auteur français qui a le mieux assimilé Poe.

Même si le fantastique et l'humour transparaissent de temps à autre dans les contes, l'idée générale qui en ressort est la bizarrerie. Et bizarre, Villiers l'était. Dernier descendant d'une famille de très vieille noblesse mais désargentée, il ne s'occupe que de son art tout en jouant les grands seigneurs, se lie avec de grands écrivains de son siècle mais ne sera pas reconnu de son vivant. Son style est flamboyant et en totale réaction contre le réalisme de l'époque. On ne sera d'ailleurs pas étonné de découvrir dans plusieurs contes une réelle aversion pour l'idéal bourgeois de son époque (cf. Les Brigands par exemple).

Les « Contes Cruels » sont dans le domaine public. Ils sont donc relativement faciles à trouver (Garnier-Flammarion, Folio, Livre De Poche, Maxi-Poche, etc.). Si vous ne trouvez vraiment pas, vous pourrez les copier gratuitement et en intégralité sur le site de la Bibliothèque Nationale de France (Gallica.bnf.fr).

Tryphoninus