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Gueule de Bois

Gueule de Bois, John Williams, 1997

Romans, Nouvelles & Théâtre

John L. Williams
1997
200 pages

Londres, 1983. Depuis sa banlieue pourrie, Jeff voit le mouvement punk s'éteindre lentement. Deux ans plus tôt, Jeff était dans un groupe, avec Ross. Or un soir de beuverie, Jeff et Ross étaient tellement déchirés qu'ils ont laissé Frank, la copine de Ross de l'époque, mourir dans l'incendie d'une maison dans laquelle ils avaient passé la nuit.

Ils n'ont rien dit et la vie a repris son cours. Ross a viré Jeff puis a tourné sa veste pour une musique plus mainstream. En deux ans, il est devenu un chanteur pop en vogue, jouant sur son côté dandy et soi-disant intellectuel. Pendant ce temps, Jeff sombrait comme beaucoup de punks obscurs dans les bas-fonds de Londres. Il survit, officiellement en tant que vendeur dans un magasin de disques d'occasion, officieusement, de petites combines.

C'est alors que Frank refait surface dans la vie de Jeff. Elle avait quitté la maison avant l'incendie si bien que Jeff et Ross n'ont rien à se reprocher. Mais Ross ne le sait pas et Jeff, secondé par Frank, y voit une belle opportunité de se venger et d'arrondir ses fins de mois en le faisant chanter.

Mais ce qu'il va surtout voir, c'est que son collègue, Neville, s'est fait descendre au comptoir du magasin par deux mecs louches. Si la police conclut à un simple crime crapuleux, Jeff conclut qu'il s'est peut-être attaqué à plus fort que lui.

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John Williams est un ancien musicien et un ancien rédacteur dans un fanzine punk. Autant dire qu'il connaît son sujet. C'est d'ailleurs le principal intérêt du livre (loin devant l'intrigue), à savoir la description de Londres au tournant des années 80, et plus particulièrement sa scène punk. A l'époque, le pays est dirigé par Margaret Thatcher et le climat est plus à l'austérité qu'à l'ouverture culturelle.

« Gueule de Bois » se situe à la fin de l'ère punk juste avant l'arrivée du NWOBHM. Williams y décrit la vie musicale de l'époque, avec les concerts pourris, les groupes plus ou moins bons, les filles faciles et les soirées de beuverie et de défonce. C'est aussi une description de l'Angleterre de Thatcher dans les quartiers paumés, rongés par la précarité, la criminalité et la drogue. C'est un peu l'ambiance qu'on retrouve dans les pochettes des deux premiers albums de Maiden, qui datent de la même époque.

L'étude du mouvement punk de cette époque est des plus intéressantes. En effet, le mouvement punk lancé à la fin des années 70 commence à s'essouffler. Les plus malins ont compris que la cause était perdue et essaient de passer à autre chose. Puis il y a les autres qui coulent avec le navire.

C'est aussi très intéressant de comparer punk et metal au même moment (même si le livre parle très peu de metal, Thin Lizzy ou Motorhead tout au plus). Le début des années 80 marque un changement de génération dans le métal. Les groupes de la génération 70, Black Sabbath et Deep Purple, secoués par le punk, voient arriver le NWOBHM, incarné par Maiden, Venom ou Saxon. Cela amène à penser que c'est peut-être précisément cette capacité à se régénérer dans la génération suivante qui a sauvé le metal, et perdu le punk.

Le livre est disponible chez Rivage / Noir (n° 444).

Tryphoninus