Romans, Nouvelles & Théâtre
Aristophane
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60 pages
Strepsiade est un citoyen athénien, pingre et volontiers malhonnête. Il décide de pourtant de rejoindre l'école du très célèbre Socrate. Non par pour élever son âme, mais pour apprendre comme léser ses créanciers avec des raisonnements fumeux ; c'est ce qu'il appelle le raisonnement injuste. Parce que Strepsiade s'est endetté pour assouvir les goûts de luxe de son fils, Phidippide pour les chevaux. Phidippide est dépensier autant que son père est grippe-sou.
Au contact de Socrate et de ses disciples, Strepsiade apprend, émerveillé, que Zeus n'existe pas, que le monde appartient à des déesses appelées Nuées et qu'outre ces fameuses Nuées, un bon socratique vénère le Vide et le Langage. Il faut dire que Socrate et ses disciples passent le plus clair de leur temps à disserter sur des choses sans intérêts ou à construire des raisonnements sans queue ni tête destinés à impressionner les imbéciles.
Mais Strepsiade a l'esprit trop lourd pour comprendre ce qu'on lui enseigne et revient sans cesse à ses problèmes pécuniaires, aux punaises qui ont investit son lit et à son fils qui dilapide tout. Excédé Socrate le met à la porte.
Toujours à la recherche d'une solution pour échapper à ses créanciers, Strepsiade réussit à convaincre son fils, un peu plus malin que lui, d'entrer chez Socrate et d'apprendre le fameux raisonnement injuste. Ce n'est peut-être pas la meilleure idée qu'il ait eue.
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Si Aristophane met une telle ardeur pour attaquer les philosophes, c'est parce qu'il est lui-même réactionnaire et qu'il cherche à défendre la société athénienne traditionnelle basée sur le respect des dieux, des anciens, en gros une société d'ordre et d'autorité.
Certains (dont Platon) ont dit que la pièce avait joué un rôle dans la condamnation à mort de Socrate en -399. Parmi les chefs d'accusation, il y a avait effectivement l'impiété et la corruption de la jeunesse. L'accusation contre Aristophane semble quand même assez sévère pour une simple satire, surtout qu'il y a 24 ans entre les deux évènements. Ce serait même plutôt l'inverse, les moqueries contre Socrate réduisent d'autant son influence et les raisons de le poursuivre.
A côté de Socrate, il y a deux personnages qui ne valent guère mieux. Strepsiade est un vieillard lourdaud. Vague ancêtre de Monsieur Jourdain, il aborde la connaissance dans une optique purement mercantile, comme un investissement : ce qu'il apprend doit lui servir à gagner de l'argent ou à en économiser.
Ensuite vient le fils, Phidippide, jeune écervelé qui suit la mode du moment pour les beaux attelages. Son nom est déjà tout un poème : Strepsiade voulait un nom qui rappelle l'épargne et sa mère, une élégante de la ville, voulait un nom qui rappelle les chevaux, symbole de réussite sociale. Le résultat est le nom Phidippide qui signifie « Qui économise les chevaux ». Dans la pièce, Phidippide n'est pas assez malin pour comprendre les vices du raisonnement socratique mais suffisamment pour l'utiliser à son profit.
La pièce est relativement facile à trouver même si c'est souvent dans des volumes reprenant plusieurs pièces d'Aristophane. Pour les hellénistes, elle existe aussi en version bilingue.