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Aeterna Tenebrae : Anima Mortalis Ars Perpetua

Ancestrale Production, 2023

Black Metal, France

Album CD

Aeterna Tenebrae est avant tout une histoire de famille, celle du black metal français. Le groupe a été fondé par le batteur Fog (qu’on ne présente plus) et le guitariste Bertrand Cunin, son premier album, Maledictus Aeternum, a vu la nuit chez Ossuaire Records, défunt label de l’ex Angmar tandis que le chanteur Erroiak, compère du six-cordiste au sein de Léthifère, a récemment été recruté pour éructer dans le micro. Cette chaleureuse fraternité qui les cimente n’empêche toutefois pas ces musiciens de forger un art qui ne rigole pas vraiment, faisant fi des sentiments les plus aimables, des émotions les plus amicales.

Cela est même particulièrement évident avec ce Anima Mortalis Ars Perpetua nettement plus brutal que son prédécesseur. L’enrôlement de Erroiak est-il pour quelque chose dans cette agressivité acrue ? Sa voix plus hargneuse que celle de Fog n’y est pas étrangère mais elle se coule au fond d’un creuset désormais plus abrasif qu’il ne l’était il y a quatre ans. L’ensemble conserve malgré tout une assise mélodique qui n’a pas été sacrifiée sur l’autel des ténèbres les plus incisives comme en témoignent un titre tel que ‘Conviction’ que sillonnent des guitares gorgées d’une sève obsédante ou l’inaugural ‘Apparition’ orné de discrètes touches pagan.

Mais ces atours plus accessibles ne doivent pas vous tromper, le successeur de Maledictus Aeternum est clairement évidé dans un bois glacial et plus tranchant que jamais à l’image par exemple de ‘Obstination’ torrentiel et qui ne s’embarasse d’aucune aménité. C’est tout un univers avalé par la nuit et les démons qui l’accompagnent qui se matérialise dans toute sa noirceur acérée (‘Instrumentation’), se masse derrière les carreaux fissurés par un gêle lugubre. Et lorsqu’il cède à un envoûtement plus reptilien comme il le fait sur ‘Propagation’ ou ‘Sequestration’, Anima Mortalis Ars Perpetua n’est pas exonéré de son atmosphère crépusculaire. Si l’absence de Fog se fait ressentir, (mal) remplacé dans une batterie artificielle, le tout vibre néanmoins d’une fureur sombrement mélodique, gravée dans un abîme venu du fond des temps.

Articulé au tour du même duo à l’origine de Léthifère, Aeterna Tenebrae conserve cependant tout son sens, toute raison d’être de part son approche à la fois orthodoxe et rongée par une lèpre accrocheuse. 

Childeric Thor - 7/10