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Léthifère : Envie la mort

Ancestrale Production, 2021

Black Metal, France

EP CD

D'après le dictionnaire, léthifère qualifie ce qui cause, entraîne ou provoque la mort. Qu'un groupe de black metal ait choisi ce mot pour se baptiser sonne comme la promesse d'un art macabre irrigué par de funestes sentiments et de sombres tourments. Dont acte. Nouveau venu au sein d'une chapelle noire hexagonale des plus fertiles, Léthifère - tel est donc ainsi son nom - n'est pour autant pas le fruit de quelques puceaux encore boutonneux mais au contraire l'alliance de deux âmes passionnées qui ont le genre chevillé aux notes, paire de musiciens chevronnés dont il semblait écrit qu'ils collaborent un jour ou l'autre, parce qu'aimantés par une même allégeance à un black metal orthodoxe et mélodique, poétique et nocturne tout ensemble.

En charge de tous les instruments, Bertrand Cunin (Aeterna Tenebrae) a composé et écrit les textes que chante Erroiak (Enterré vivant) tapissant les quatre plaintes serrées dans un EP séminal d'une petite vingtaine de minutes. Celui-ci se dresse comme le sépulcre d'une noirceur torrentueuse charriée par des riffs obsédants et une litanie écorchée.  Alliage de vélocité et de mélodies entêtantes, ces saignées privilégient la simplicité dramatique aux longues reptations ce qui ne les empêche ni d'épandre des ambiances d'une froideur médiévale ('De toute part') ni de creuser dans la terre de lentes crevasses à l'image de ce 'Au fond des âmes' dont les boyaux abrasifs tendus par le guitariste sont perforés par les morsures hurlées d'un Erroiak aboyant dans la brume gelée d'une nuit dans étoiles.

S'il est permis de regretter le manque de variété d'un menu ramassé dont les quatre titres se distinguent peu les uns des autres, de belles idées les sabrent néanmoins, comme l'illustre le rampant 'Dans les abîmes' dont les griffures raclent la chair y labourant des cicatrices gonflées d'un pus macabre. Obole trop courte peut-être, Envie la mort n'en renoue pas moins avec la minérale pureté scandinave originelle que les paroles taillées dans la langue de Molière drapent d'un lugubre linceul poétique combinées à une épure incisive dans sa pugnacité mélodique.

Reste à voir quel avenir est promis à ce Léthifère riche d'un potentiel encore à peine défloré mais dont les deux auteurs aiment multiplier les collaborations avec les copains, condamnant parfois leurs projets à un chemin irrégulier et incertain... Souhaitons que tel ne soit pas le cas de celui-ci tant ses vingt minutes ont su aiguiser notre appétit... 

Childeric Thor - 7/10