Hells Headbangers Records, 2022
Black Metal, Grèce
Album CD
Sans doute moins renommé que Rotting Christ ou Nocternity, Medieval Demon compte pourtant parmi les vétérans de la chapelle noire hellénique, prêchant la parole impie depuis quasiment le début, il a presque trente ans. Une alliance avec son compatriote Invocation et une poignée de démos plus tard, le groupe enfante finalement son premier méfait (Demonolatria) en 1998... Avant de se saborder aussitôt après ! Il faudra ensuite patienter une quinzaine d'années pour le voir renaître de ses cendres autour de l'inamovible duo composé par le chanteur Sirokous et le batteur/claviériste Lord Apollyon. S'en suivent trois offrandes dont ce Black Coven qui nous intéresse présentement.
Si cette trajectoire un brin chaotique l'a privé d'une exposition plus grande et méritée, au moins lui assure-t-elle à la fois une certaine aura culte et une maîtrise évidente dans l'expression d'une obscurité aussi démoniaque que macabre. Ce qui explique l'excellente tenue de cette quatrième hostie que ne grèvent ni défaut ni faiblesse. Sa superbe pochette signée Mark Riddick (Fetid Zombie) où une femme est étendue sur un autel dans toute sa nudité tentatrice prête à accueillir un sacrifice diabolique offre un premier et alléchant contact, promesse d'un contenu sinistre à bien des égards.
Mais s'inscrivant dans la longue tradition du black metal grec, Medieval Demon ne sacrifie jamais les mélodies sur le bûcher d'une violence noire et débridée qui s'épanche toutefois au détour de saillies parfois tumultueuses ('Nocturnal Sacrilege'). Une prise de son étonnamment claire, des morsures de guitares acérées mais limpides ('The Graves Dwellers') et l'omniprésence des claviers, lesquels tapissent ces cavités intimes d'une luxuriance brumeuse, participent de ce lustre mélodique. Par ses atours gothiques, Black Coven nous évoque agréablement tout un pan de l'art noir de la seconde moitié des années 90, emphatique et atmosphérique tout ensemble.
D'une efficacité empreinte de nostalgie, les Grecs n'en démontrent pas moins une personnalité plus affirmée qu'il n'y parait, laquelle doit beaucoup à l'usage surprenant d'un saxophone qui loin de dispenser une présence saugrenue, se glisse avec une beauté déchirante et morbide entre les cuisses de ce black serti d'une solennité baroque, témoin l'épique piste éponyme et assurément point d'orgue d'une écoute placée sous le signe d'un bourgeonnement ténébreux. Avec une réussite insolente, Medieval Demon nous rappelle ainsi combien cet instrument rare dans le genre s'y accouple pourtant généralement avec succès, que l'on songe par exemple à Solefald et son album In Harmonia Universali.
Réceptacle de sept psaumes dont l'accroche nerveuse se conjugue à des ambiances nocturnes de rituels souterrains, Black Coven ravive la flamme d'un art noir séculaire et ce faisant confirme que ses créateurs sont enfin lancés sur une carrière régulière et plus inspirée que jamais.