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Peine Kapital : Ecchymoses

Auto production, 2021

Sludge Doom, France

EP digital

Il y a vraiment quelque chose de malsain, de pourri, de vicieux dans Peine Kapital. Cela commence avec ce nom dont le deuxième mot est écrit avec un "k" et non un "c", manière d'en perturber la lecture. Il y a ensuite le logo du groupe qui pue le bon vieux grindcore barbotant dans le vomi et les viscères. Il y a enfin ces visuels, oppressants et contestataires, faits de collages évoquant le hardcore et le punk. Le genre de truc bien crasseux et brutal qui fait saigner les muqueuses. Bref, du haineux sans doute, du nihiliste peut-être, du méchamment viscéral sans aucun doute.

Le trio alsacien se forme en 2017. Deux démos et un split avec Sleazebag plus tard, il crache ce premier EP. Ecchymoses qu'il s'appelle. On ne saurait tomber plus juste tant Peine Kapital en laisse beaucoup, des ecchymoses, chez le malheureux qui tenterait de se frotter à lui sans se méfier. Si les références jetées plus haut augurent d'une bestiole survoltée éjaculant sa semence à la vitesse d'un ado boutonneux, les Strasbourgeois prennent au contraire leur temps, étirant la douleur avec masochisme durant près de vingt-cinq minutes, durée de la seule piste qui compose cette hostie poissée de sang et de cambouis.

Mais rassurez-vous (ou pas), ce format généreux ne grève 'Ecchymoses' ni de sa noirceur furieuse ni d'une radicalité protestataire, lui imposant au contraire une verve agonisante et suppliciée. Il constitue le charnier d'un sludge doom ferrugineux et vindicatif duquel toute trace d'espoir sinon de lumière est évidemment éconduite. La porte solidement cadenassée, le morceau ne laisse filtrer que bruits grinçants, sonorités corrosives et râles écorchés. Le tout enferré dans une lenteur décrépie exhalant une inexorabilité absolue. Les trois lascars, basse, batterie, noise et dégueulis vocaux mais sans guitare, se montrent à l'unisson d'une reptation lépreuse et acariâtre dans les profondeurs de boyaux rongés par la merde.

Ca hurle tout du long, couine comme une mécanique rouillée, vocifère comme un animal qu'on égorge dans un froid matin d'hiver. Dénué de toute progression, 'Ecchymoses' n'avance pas mais, figé dans une urbanité fétide, recule, poussé par des spasmes percussifs dans un fracas punitif. Samples révoltés et ruines bruitistes consument cette panse mazoutée qui s'étale comme une marée noire.

Uppercut dans la gueule ou coloscopie un peu rude, on ne sort pas indemne de cette saillie polluée dont on attend la suite avec un mélange d'effroi et de jouissance corrompue.

Childeric Thor - 8/10