Indépendant, 2016
Black Metal, France
Digipack
Aujourd’hui, nous allons parler d’un groupe français que j’apprécie bien, il s’agit de Thallium.
Thallium est un groupe de black metal français avec à sa tête une femme. Chimera compte ainsi parmi les rares frontwomen du metal extrême français. Ce groupe existe depuis 2008 et progresse tranquillement de manière indépendante un peu comme les vrais groupes de black metal des années 90. En 2015, il sort une première demo, Act I: The Beginning. Celle-ci est accompagnée d'un clip vidéo pour le morceau I Am Death où on peut observer un visage très violent pour le groupe. Que ce soit dans la gestuelle ou la musique, ils ont su poser dès leur début leur attachement au black metal haineux et sans âme. Un an plus tard, ils lâchent leur premier album, Act II: Internal War, que nous allons tenter de décrypter ici, presque 2 années après sa sortie.
On commence avec When The Sun Goes Down. En guise d'introduction, un De Profundis vient telle une émanation, quelque chose qui émerge des tréfonds du monde pour exploser à la surface en blast beats violents et riffs sombres. Le chant de Chimera arrive alors, écorché et plein d'émotions. Suite à cette explosion de rage, un passage plus mélancolique pointe son nez avec quelques touches de claviers rappelant l’immortel In The Nightside Eclipse d'Emperor. Ceci apporte déjà une dualité intéressante entre la haine et une mélancolie qu'on retrouve dans les morceaux Necromance et Martyr par la suite.
Necromance bénéficie d'un soin particulier à l'écriture. Le début est plein de mélancolie, dramatique même par le biais des synthés. Vient ensuite le refus violent accompagné de " nothing should take you " hurlés tels des credos désabusés. On comprend alors qu'il s'agit de quelqu'un qui perd l'être aimé. Une fois l'acceptation passée, vient alors la colère, ultra violente, pour finir vers la nécromancie avec un chant ressemblant presque à des incantations morbides. Cette progression dans le morceau adapté au texte le rend marquant, et être capable de ça dès un premier album laisse penser de bonnes choses quant au potentiel du groupe.
Le chant de Chimera est intéressant. Outre les émotions, il possède un débit assez particulier, presque saccadé par moment et peut être aussi bien guttural que lancinant. De plus, il est doublé en stéréo, lui donnant une présence assez particulière puisqu'elle est omniprésente et nous englobe de manière presque étouffante. On a alors une clef d'analyse pour cet album non négligeable. En effet, la guerre interne évoquée dans le titre de l'album correspondrait en fait à la dualité étouffante entre la haine et la mélancolie chez l'être humain, marqué par la vie dans une atmosphère sombre et mystique. Un peu comme une fatalité du destin, quelque chose qui de part sa nature lui est inévitable.
Cette fatalité mystique est d'ailleurs bien interprétée dans l'interlude musicale de l'album venant après Vacuum. Vacuum est d'ailleurs le morceau apportant un côté plus mélodique aux riffs de guitare de l'album, tendance qu'on retrouvera sur Disgusting Scent également jouant très souvent sur la mélancolie jusqu'à New Age, dernier morceau de l'album. Là, la mélancolie n'est pas vraiment de mise, il s'agit plus de nostalgie envers le passé qui jusqu'à la fin du morceau vient mourir et redescendre vers les tréfonds du monde, terminant le cycle ouvert avec When The Sun Goes Down.
Avec Act II : Internal War, Thallium a sortit un premier album intéressant qui laisse envisager un certain talent pour les compositions musicales variées et pleines d'émotions. Leur black metal est à la fois violent et mélancolique, ce qui a caractérisé pendant longtemps la scène française jusqu'à maintenant. Même si on entend clairement le son de batterie électronique, ce qui peut être dérangeant pour certains, les musiciens sont bons et le travail de ce groupe n’est pas à négliger. S'il fallait les comparer de manière évolutive, je pense qu’ils sont dans la phase Drudenhaus d’Anorexia Nervosa. Reste à voir ce que ça donnera quand ils atteindront la maturité de New Obscurantis Order, mais je ne me fais pas de souci pour eux !