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Darkspace : Darkspace I

DARKSPACE - Darkspace I

Haunter Of The Dark / Avantgarde, 2003

Ambient Black Metal, Suisse

CD

L'Ambient, vous connaissez ? Mais si, voyons... Ce fameux dérivé de musique électronique tissant, à l'aide de sonorités bien souvent primaires et minimalistes, des atmosphères aptes à transporter votre âme vers de lointains horizons, dans la plénitude la plus totale... Le Black Metal, dans son éclectisme acharné, a vu s'incorporer cette substance électronique dans sa musique dès le milieu des années 90, BURZUM étant très certainement le meneur de ce nouveau « sous-genre », avec l'album \" Hvis Lyset Tar Oss \".
Mais tandis que Varg Vikernes, lorgnant de plus en plus vers l'Ambient pur, descendait du trône sur lequel il siégeait paresseusement depuis trop longtemps, le genre musical qu'il avait créé se propageait peu à peu à travers toute l'Europe...

Après cette brève leçon d'histoire musicale, tournons-nous vers le sujet principal de cette chronique : le premier album des helvètes de Darkspace , très sobrement intitulé \" Darkspace I \". C'est un an à peine après une première et unique démo fort prometteuse, contenant un Ambient Black à la masse plutôt imposante, que le groupe refait surface. Inutile d'y aller par quatre chemins, annonçons d'emblée la couleur : si vous êtes amateurs d'Ambient Black, ou simplement de Black Metal en général, ce disque comblera toutes vos attentes les plus folles, et même plus. Pour un premier essai (ou plutôt second), c'est un véritable coup de maître : la formation suisse se hausse sans peine au rang de groupe culte, de ceux qui ne peuvent être écoutés sans laisser une marque indélébile au plus profond de ceux qui sauront tirer toute l'essence d'une musique aussi Grande.

Et là, une question se pose : avec une ambiance maintenue à un degré pareil, peut-on encore parler de musique ? La réponse est oui... Même si celle-ci ne représente qu'une infime partie de ce que contient réellement \" Darkspace I \".
Pourtant, l'on pourrait aisément décortiquer cette galette et les sept hymnes qu'elle renferme.
Comme le veut la tradition, la production est des plus malpolies, et met à l'écoute des riffs typiquement Black dont certains migrent vers un Thrash Metal plus direct, ainsi qu'une basse donnant le relief nécessaire aux différentes compositions. La batterie, quant à elle, oscille entre le rapide et l'épileptique : les rythmes alternent entre tempi medium et (très) rapide, et le blast est bien évidemment de rigueur (est-ce vraiment un batteur en chair et en os qui martèle les fûts ?). La légère touche Indus dont bénéficient les vocaux rend ceux-ci froids et distants, parfois presque imperceptibles. Et, bien entendu, les glaciales nappes de clavier inhérentes au genre Ambient Black sont elles aussi de sortie. Jusque là, rien de bien original pour de l'Ambient Black, me direz-vous...

Mais, comme doivent bien souvent le répéter de nombreux auditeurs de Black Metal pour défendre leur style musical de prédilection, l'intérêt est ailleurs. Et les trois Génies que sont Wroth (unique membre de PAYSAGE D'HIVER , autre formation suisse à l'excellence rare), Zorgh et Zhaaral, ont créé l'une des Œuvres les plus saisissantes qu'il m'ait jamais été donné d'écouter.

« Dans l'espace, personne ne vous entendra crier »... Ou le concept du disque réduit à sa plus simple expression. Mystique et magnétique, froid et haineux, puissant et spatial... D'une densité inespérée, \" Darkspace I \" vous convie à la plus fascinante des expéditions, à des milliers de kilomètres de la Terre, là où aucun être n'aura la chance de poser un jour les pieds. Vous pourriez aussi bien vous trouver sur une des plus lointaines planètes du système solaire, arpentant des terres vierges et hostiles, que dans l'espace, contemplant le vide astral infinitésimal vous entourant... Les sept pistes composant l'album n'en forment alors plus qu'une seule : plus de 75 minutes d'un voyage intemporel, duquel rien ne pourra vous extirper...

Si le commun des mortels n'entendra à l'écoute de cette galette qu'une infâme bouillie sonore, le Black Metaller averti connaîtra, à n'en pas douter, une expérience riche en émotions noires dont il ne sortira pas nécessairement indemne...

Vous l'aurez donc compris : le premier full-length de Darkspace est un disque à se procurer impérativement, et ce de n'importe quelle manière que ce soit. Jamais disque de Black Metal n'avait été, par le passé, à même de transcender l'auditeur avec tant de maestria, et il semble à présent inconcevable qu'un album de cette trempe puisse à nouveau voir le jour ; seul \" Darkspace II \", second album du groupe, réussit à mon sens à placer la barre encore plus haut. A l'écoute d'un tel Chef d'Œuvre, une comparaison (qui pourra peut-être sembler osée aux yeux de certains) me vient à l'esprit : Darkspace est au Black Metal ce que sont Mozart, Schubert et Wagner à la musique classique : des Indispensables.

PS : Vous remarquerez l'absence de note. J'espère qu'après lecture de la chronique, les raisons de cette absence vous sembleront évidentes.

Krieg - -/10