Distant Voices, 2017
Black Metal, France
EP CD
One-Woman Band, Aube Grise revient (déjà) nous rendre visite avec Hanterieur, opuscule qui répand son spleen délavé en deux pistes pour presque vingt minutes de sonorités sales et décharnées. Creusant le sillon dépressif entamé par Feue et Mauvaise augure, ce troisième signe de mort voit sa génitrice peaufiner peu à peu son art, découpé dans un black metal lo-fi pluvieux qui rappelle par moment l'éphémère Amesoeurs en mois urbain et plus terreux.
Son format court lui donne également l'occasion d'expérimenter quitte à s'éloigner des rivages ferrugineux, même temporairement, ce dont témoigne la seconde plainte qui voit Anna M. braconner sur les terres de la coldwave, aidée dans son aventure par son complice Thomas Bel (Misery) dont le chant clair hachure ce Hanterieur II d'une couleur plaintive, jusqu'à l'éruption finale et abrupte où le metal noir reprend ses droits dans un registre cependant tout aussi suicidaire. Peu sensibles à ce genre froid et minimaliste, notre préférence se dirige toutefois vers le premier titre, naturellement baptisé Hanterieur I, lequel étire sur plus de onze minutes un mal-être pollué et dissonant, charrié par une guitare qui hurle, rongée par une lèpre rouillée.
Squelettique, cette reptation ouvre doucement ses cuisses en de longs et immobiles préliminaires q ue vrillent des accords maladifs. Puis la voix écorchée de la maîtresse de cérémonie surgit, noircissant encore un peu plus le ciel sombre qui s'étend sur ce paysage d'une hivernale froideur. D'une lancinante funéraire, le tempo est prisonnier d'une geôle humide où s'entassent remords et regrets. Des touches coldwave drape tel un linceul grisâtre une dernière partie désenchantée.
Dédié à la comédienne lituanienne Katerina Golubeva qui a hanté jusqu'à sa mort en 2011 le cinéma aride et exigeant de Sharunas Bartas, Claire Denis, Bruno Dumont et surtout Leos Carax, Hanterieur se présente, à l'instar des autres réalisations du label Distant Voices, sous la forme d'un objet précieux au tirage limité et confirme les (très) bonnes impressions laissées par ses prédécesseurs. Depuis, Aube Grise a déjà enfanté une nouvelle offrande, L'encre et la terre...