07/11/2004
La Fée Verte, Lyon
C'est une chose vraiment surprenante que d'avoir organisé un concert d'Hocico dans une si petite salle ne pouvant accueillir même pas 100 personnes pour ce groupe culte venu du Mexique qui peut remplir à lui seul une salle avec au moins 300 personnes... Bref, il est inutile de préciser que le concert était sold out et qu'il avait fallu anticiper l'achat de sa place bien à l'avance... Une véritable énigme mais bon passons...
Une première partie locale de Lyon du nom de .cut Featuring Gibet ouvre la soirée dans une optique plutôt industrielle expérimentale. Le duo est revêtu d'une tenue longue blanche ainsi que d'un bandage sur toute la tête, une évocation évidente du groupe culte electro indus des années 80 Klinik, premier projet de Dirk Ivens. Musicalement rien à voir. Il s'agit d'une musique ambiante industrielle expérimentale allant crescendo. En ce sens qu'on a un son dont le rythme (on va dire plutôt la vitesse car ce n'était pas une musique rythmique) ou le bruit s'accroît, s'enrichie et s'intensifie au cours de la plage. Des sons qui parfois font écho à de la " musique étrange 70s ", évoquant le film Voyage au centre de la terre ou encore le groupe Theatrum Chemicum.
Spetsnaz prend ensuite le relais dans un registre complètement différent puisqu'il s'agit d'EBM musclée. Musclée dans un double sens. D'abord il s'agit d'une musique pour body buildé (pour s'entraîner en salle de musculation) à l'image de la pochette de leur nouvel EP Perfect Body. Et musclée parce que dynamique. Avec ce duo suédois qui s'inscrit dans la tradition de l'EBM des années 80 (Daf, Front 242...), on voit bien la différence avec l'electro dark car rien vraiment de dark dans cette musique. Ici, on a plutôt affaire à un culte du corps masculin qui a d'ailleurs donné plusieurs réputation à l'EBM (electro body music). D'une part, musique de " facho " (cf culte du corps masculin dans les régimes totalitaires) et d'autre part, musique de pédé car Front 242 aurait été beaucoup écouté au début également dans des discothèques homosexuelles. Ici, on avait plutôt une synthèse avec un public qui en considération de son attitude incarnait les deux : une mouvance " facho / pédé ". Quel drôle de mélange ! Comprendre : attitude très virile (rien d'efféminé en effet) mais en même temps, on pouvait décrire les personnes au premier rang comme des groupies mâles tentant assez lamentablement de draguer le chanteur... Tentative qui s'est d'ailleurs prolongée après le concert au bar. Alors est-ce que cela reposait sur une réputation du duo suédois ou plutôt sur la réception des fans d'EBM lyonnais et de Lille (puisqu'il y en avait également). Je penche plutôt pour la deuxième solution. Visuellement, le groupe se contentait d'exécuter le chant et les percussions électroniques sur une musique pré-programmée avec un " percussionniste " avec une belle raie sur le côté (quoiqu'à mon avis pas encore vraiment martial). Bon, musicalement l'ensemble était bon dans le style, bien que se soit minimaliste à la différence par exemple de VNV Nation qui rajoute des nappes de synthés tout en appartenant à la mouvance EBM. Par contre, les fans criaient des " true ebm ". On peut donc se demander si une mouvance réactionnaire ne se serait pas constituée au sein de la mouvance.
Puis avec Hocico, on entre pleinement dans l'electro dark, à savoir une musique à base électronique enrichie d'atmosphères bien sombres et d'une voix malsaine et agressive. J'avais découvert ce groupe à la sortie de leur premier album Odio Bajo el Alma en 1997. Il faut dire que les Mexicains qui sortaient du lot ont su rapidement s'imposer comme une référence de la vraie bonne scène electro dark aux côtés de Wumpscut, Suicide Commando, Yelworc et d'autres. Et si Hocico nous fait l'honneur de sa présence, c'est dans le cadre de la tournée de promotion de leur quatrième excellent album Wrack and Ruin, plus sombre que le précédent Signos de Aberracion qui mettait peut-être plus l'accent sur le côté electro tout en préservant bien sûr le côté sombre et haineux. Niveau prestation, le duo est donc apparu sur cette petite scène avec un look allant chercher dans l'imagerie dark post punk de leur influence Skinny Puppy, bien présente mais ici totalement digérée et surtout bien modernisée. Et l'élève dépasse ici de loin le maître. Un chanteur très déchaîné et un claviériste concentré puisqu'ici la prestation ne se limite pas aux percussions. Le claviériste d'ailleurs bien typé mexicain dans son ascendance aztèque. Le show est accompagné de projections vidéos diverses, qu'elles soient macabres, images de synthèse ou références à leur racines mystiques. Un concert excellent, principalement axé sur le dernier album avec un ou deux titres de Signos de Aberracion comme le très bon Untold Blasphemies en rappe. Mais, par contre, pas de présence des deux premiers albums. Bref, une référence de l'electro dark prouvant une fois encore que ce n'est pas parce qu'il s'agit de musique électronique (en l'occurrence sombre bien évidemment) qu'elle se limiterait à faire " danser ". Bien au contraire, c'est une musique à la fois rythmée, malsaine et agressive. Mais bon, il y aura toujours des idiots pour se conforter dans un telle vision, faisant écho à certains métalleux qui dès qu'ils entendent deux notes de musique comportant des éléments metal se sentent obliger de bouger bêtement leur cheveux sans distinction que se soit émotionnel ou bourrin. D'une part et d'autre, il s'agit de gens qui ne comprennent rien à la musique ou en tous cas la ressentent de manière superficielle. En tout cas, Hocico nous donne un aspect bien différent de l'imagerie touristique et estivale que l'on a d'un pays comme le Mexique et de Mexico City qui est avant tout la ville la plus polluée du monde.