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Gorgoroth / Enthroned / Tyrant

20/11/2007

La Locomotive, Paris

Voilà une affiche qu'il aurait été dommage de rater. En pleine grève des cégétistes, beaucoup ont défié l'obstacle-RATP pour se rendre aux pieds de la Loco qui s'est, pour cette occasion spéciale, vêtue d'un noir solennel. Il est près de 20h30 quand débute le concert organisé par Garmonbozia. Une première partie assez intrigante, avec un Tyrant plus dynamique sur scène qu'en album. Le groupe suédois de black / death joue le jeu de la communication avec le public. Sur ce plan-là, ils ne réussissent cependant qu'à moitié. Malgré l'accueil poli réservé au groupe, une bonne partie de la salle est mitigée. L'attention est là, mais beaucoup décrochent. Dommage. Le son est travaillé de manière très personnelle. Crade et déstructuré pour les uns, dans le sens péjoratif du terme, old school pour les autres. Nous sommes loin d'un son clair et limpide. Mais quelque part, c'est ça qui nous accroche, et donne de la profondeur au show. Les influences du groupe paraissent évidentes. Des racines très rock'n'roll surgissent de sous la terre. Tyrant ressuscite les anciens, et fait largement honneur aux gros calibres du heavy. Mötorhead est là, tout comme ça respire les hautes aspirations de Bathory. Malgré tout, la prestation est relativement plate, sans moments cathartiques ou vraiment prenants.

Tyrant - Paris, 20/11/2007

Tyrant - Paris, 20/11/2007

Dans la salle, Gaahl et King ov Hell sont tranquillement assis sur un sofa, l'air stoïque et concentré. La présence momentanée des acolytes est vite remarquée... Le fait de se livrer ainsi à la fosse aux lions leur vaut quelques séances photos sauvages.

Enthroned arrive. Globalement, le spectacle est impressionnant. Quelques soucis de réglage de son viennent perturber le groupe, qui commence à être sérieusement agacé. Sinon, pas un nuage à l'horizon. Une reprise d'Arkhon Infaustus vient chatouiller nos oreilles de franchouillards parisiens. J'entends même quelques quolibets bien stéréotypés et chauvins à deux sous : « cocorico » caquette la basse-cour. En pleine période de remous séparatistes belges, Enthroned nous offre une véritable preuve de francophilie. Mais, mis à part le côté politique de la chose (dont on ignore finalement s'il était voulu), le groupe montre sa capacité à manier avec habileté le titre d'Arkhon et à en sublimer la substance. Quelques mots viennent rafraîchir l'atmosphère : « Vous êtes une belle bande d'enculés », nous balance gentiment Nornagest. Un poète comme on n'en fait plus.

Enthroned - Paris, 20/11/2007

Entracte. La crispation est là. Il y a de ces moments-là annonciateurs de quelque chose... de spécial. La préparation à la performance de Gorgoroth fait partie de ces instants. Comme si un oeil omniscient nous guettait et qu'il s'apprêtait à nous jeter un fléau à la figure, chacun semble sur ses gardes. L'impatience commence véritablement à se faire sentir. Mise en place du decorum : cinq torches sont disposées sur scène. Sans plus. Une rampe altière et imposante, qui annonce la couleur...

23h15. Gorgoroth débarque. La salle retient son souffle. Procreating Satan ouvre le bal. Dès les premières notes, on est envoûté par la force du son. Rien n'est vraiment sur joué, rien n'est décalé. La stature du groupe est époustouflante, difficile de dire le contraire. Peut-être avait-il en tête d'afficher clairement qu'il est capable de voler de ses propres ailes, même sans Infernus. Tout le monde a bien entendu en tête la polémique qui enfle à propos de la séparation du groupe. Le dynamisme et l'allure sont au rendez-vous. Les morceaux se succèdent sans hic ni imperfection. Les détracteurs de Gorgoroth n'ont qu'à bien se tenir : la cohorte ne s'emmêle jamais les pinceaux, conservant une ligne de conduite stricte et professionnelle. Pas de grand guignol à l'horizon. Après avoir débuté la performance en douceur, Gorgoroth déroule le fil de son cérémonial de façon aisée et harmonieuse. Forces of Satan storms suivi de Rite of infernal invocation marquent l'entrée en matière imposante. La setlist est organisée de façon très logique. Puisant sa force dans le satanisme protocolaire, Gorgoroth nous offre une démonstration parlante de ce qu'est l'acquisition par le black metal d'un mouvement spirituel peu commun. Profetens Åpenbaring et Incipit Satan : deux des meilleurs moments du spectacle, à en juger par la qualité des morceaux qui nous sont restitués sur scène. Puis, vient la phase d'envoûtement total. Possessed by Satan et Unchain my heart (Gorgoroth, c'est aussi de la sensibilité...) signent la transition entre le doute et l'allégeance aux « gourous »... Le terme est certes complètement ordurier, mais il ne manque pas de décrire l'état qui tient la salle en haleine. La possession. Une quasi-dévotion aveugle pour certains, très excités à l'idée de toucher la main de Gaahl, très communicatif ce soir. La déferlante entraîne sur son passage ce qui nous reste de lucidité. Prosperity and Beauty : comme un pied-de-nez aux règles de paraître et de réussite qui régissent la plupart des sociétés humaines. Amour, Gloire et Beauté en somme (non, je n'ai peur de rien, pas même de cette référence douteuse). Gorgoroth nous aura prouvé qu'il y a les petits et les grands calibres. Les baroudeurs, et les touristes de passage. Qu'officier dans cette branche demande une dose certaine de noblesse et de professionnalisme. De quoi faire mal aux petits joueurs... Je quitte la salle avec cette intime conviction d'avoir assisté à l'un des meilleurs concerts de l' année. Bien que très stéréotypée, la musique de Gorgoroth, couplée à un jeu de scène impressionnant, bénéficie d'une caractéristique indéfectible : la MAITRISE.

Gorgoroth - Paris, 20/11/2007

Gorgoroth - Paris, 20/11/2007

Gorgoroth - Paris, 20/11/2007

Gorgoroth - Paris, 20/11/2007

Myrha