25/06/2008
Transbordeur, Lyon
On peut dire que cette date à Lyon était attendue de longue date et que MyReferencevents attendait beaucoup de monde, comparé à l'excellent concert, certes culte mais assez confidentiel au final d'ESOTERIC, doom oblige. Concert très attendu car d'une part Ministry ne passe pas souvent par ici (le passage le plus proche étant Lausanne une semaine avant), bien que la France cette fois-ci soit bien desservie, mais surtout dernière (et première pour certains) opportunité de les voir puisqu'il s'agit là de la dernière tournée avant que Ministry ne cesse ses activités. Pour ma part, cette dernière opportunité sera la troisième, les ayant vu, quelques années avant à Genève (2003 ?) ainsi qu'en août 2006 en Hongrie lors du fameux Sziget Festival, ces deux concerts m'ayant laissé un excellent souvenir.
Par précaution de ne pas rater Ministry, les gros concerts lyonnais étant de bonne heure, je n'ai pas échappé à une première partie locale des plus dispensables tandis que la salle était encore peu remplie. DOBERMAN se définit comme du « hardcore punk rap », une définition assez correct qui permet de comprendre qu'il s'agit de neo metal de la tendance Linkin Park et compagnie avec un chant parfois rap assez déconcertant. Mais bien plus que la musique dont on peine à saisir le rapport avec Ministry ainsi que cette incroyable opportunité accordée à ce jeune groupe lyonnais, c'est vraiment l'attitude pseudo-rebelle et ridicule du chanteur qui lassera surtout. On pourra citer à titre d'exemple, les dédicaces " à tous les zicos qui font de la zic " ou encore les pseudo-insurrections contre le contrôle et les quotas " et bientôt pour acheter des CDs ", ou encore la " dénonciation " de la sécurisation de la salle (certes excessive mais déjà pas mise en place pour eux)... Bref pour ceux qui veulent en savoir plus, un premier album est disponible au titre bien cliché et qui fait mine d'artiste poète engagé, " Trop d'obéissance tue l'insolence ", qui est en téléchargement gratuit sur le site du groupe. Le groupe a donc économisé un pseudo engagement contre le téléchargement qui tuerait l'industrie du disque (qui permet bien plutôt de cibler ses achats sur des productions de qualité à une époque où il y a nue surpopulation de disque sur la marché). Inintéressant donc et totalement inutile. Je pense que ça n'aurait été problématique pour personne de se passer de cette première partie locale et d'ouvrir les portes plus tard plutôt que ménager cette longue attente.
La vraie première partie est assurée par My Uncle The Wolf , jeune groupe fondé en 2005, qui accompagne Ministry sur sa tournée d'adieux, et qui n'a lui aussi pas grand-chose à voir non plus avec le metal indus. Et qui est même d'un autre univers, puisqu'il s'agit plutôt de metal stoner, mais qui sans rien inventer a pour sa part le mérite d'être intéressant. Le groupe est souvent comparé à Down, d'ailleurs un ancien membre du groupe joue au sein de Down. Le t-shirt Crowbar du guitariste n'est pas anodin puisque la musique prend parfois des accents doom par instant, enfin sabbathien, tout en baignant dans une atmosphère psychédélique, à l'image de la dégaine des musiciens avec dreadlocks, longue barbe, etc (pas trop l'image que l'on a des groupes de Brooklyn). Ou encore des engagements du groupe en faveur de la consommation des drogues douces ? Ils ont donc présenté ce soir leur unique album éponyme. Certains morceaux était plutôt bons, ceux en fait qui étaient plutôt lourds (The same as fire qui flirte un peu avec du Cathedral), d'autres plus lassants quand ils versent trop dans le psychédélique planant (Lift the storm). Le groupe a en tout cas bien assuré sa prestation, dans son style, devant un public clairsemé et discret qui ne lui était pas acquis et qu'il n'a pas vraiment conquis, sa musique psychédélique et groovy étant clairement en décalage avec la musique de Ministry, directe, tranchante et violente.
Puis l'installation de la scène pour Ministry se met en place devant un public qui se révèle très nombreux, avec la mise au devant sur la scène des deux grandes grilles alors en arrière-fond et qui n'en bougeront plus du concert, même si les musiciens n'hésitent pas à la franchir parfois pour se rapprocher, laissant surgir cette interrogation quand à savoir si elles font partie intégrante du show et du concept développé par le groupe, ou si elles sont là par sécurité, le groupe ayant été victime d'une agression de gaz lacrymogène sur scène la veille à Toulouse... Ce qui confortera du coup ceux qui croient que cette critique omniprésente de la politique de Bush par Ministry depuis trois albums est subversive et risquée, certes peut-être aux USA, et encore, mais pas vraiment en France, qui attire bien plutôt de la sympathie à l'égard du groupe dans l'opinion publique et qui fait vendre. Cela étant dit, Ministry a toujours proposé quelque chose de visuel. Et les montages et collages vidéo font partie intégrante du show et sont vraiment de qualité (bien que les pogoteurs semblent ne pas y porter une grande attention). Elles sont telles les clips officiels de Ministry et malgré cette fixation sur Bush, ils rappellent bien les clips des Tapes of Wrath avec leurs évocations de la guerre (folklore typique de l'indus au sens large), les émeutes, le contrôle, la répression et la révolte, etc.
Le show commence de façon assez inattendue par la diffusion intégrale d'un nouveau morceau assez long et répétitif de Revolting Cocks supportée par une vidéo minimaliste d'animation, qui vu les paroles répétitives devrait s'appeler I'm not a gay, un morceau plutôt cool au mauvais sens du terme avec un beat electro moyen, bien éloigné de Ministry. Ce qui confirme en tout cas, qu'avec la fin de Ministry. Revolting Cocks sera mis au premier plan et prendra la continuité de Ministry. Al a annoncé d'ailleurs que le mandat de Bush se terminant en novembre, son combat via Ministry prenait fin. Mais c'est peut-être surtout qu'avec Revolting Coks, il peut explorer d'autres horizons (on ne lui pardonnerait pas cela sous le nom de Ministry) car les trois derniers albums propose un metal indus violent, et imposant, qui auront confirmé que le vrai Ministry est celui qui a atteint son sommet avec Psalm 69. C'est d'ailleurs ces trois derniers albums qui constitueront le show, il n'y aura pas de morceaux anciens avant le rappel, Ministry ayant assez de bons morceaux en réserve désormais pour se passer des traditionnels recours aux vieux morceaux, le Ministry d'aujourd'hui étant de grande qualité et faisant échos aux meilleurs albums de sa carrière. Il parait donc assez évident que les mauvais albums de la période creuse que son Filth Pig et Dark Side of the Spoon, n'ont pas été évoqués ni même Animositisomina qui au final n'avait fait figure que de pale retour et de redressement de la barre aux yeux de ce qui allait suivre, et leurs présences n'auraient fait qu'entacher la qualité de cet excellent show. J'ai eu toutefois quelques échos sur le net de gens étonnement déçus, il s'agissait probablement d'adeptes de ces albums-là.
Après cette intro décalée, Ministry est donc monté sur scène avec assez logiquement au vu de son titre, Let's go premier titre du dernier album. Suivront plusieurs titres de The Last Sucker , parmi les meilleurs de l'album, comme The dick song, Watch yourself, Life is good et le morceau éponyme. Puis ensuite Ministry se concentrera sur l'excellent Houses of the Mole, l'album au final le plus proche de Psalm 69 avec ici encore une concentration sur les meilleurs morceaux de l'album, les plus puissants, qui se concentrent comme pour les 3 albums sur la première partie de l'album (?!?), les albums péchant un peu sur la fin. Ce qui suppose donc la présence de l'incontournable No W sans toutefois le sample de Carl Orff, Waiting, Worthless et Wrong. Pour rappel, tous les morceaux de Houses of the Mole commencent par un "w" montrant ainsi que Bush serait partout, avec cette vieille idée que " Big brother is watching you ". Mais comme je le disais, malgré un concept un peu lourd, et stéréotypé quelque part, Ministry est en tout cas une machine bien huilée où tout est parfait : les vidéos synchronisées avec la musique, un Al charismatique, fidèle à lui-même et à son image, avec son micro typique (sorte de guidon de moto sur os !). Et puis ça fait également plaisir de voir Tommy Victor de Prong à la basse. La set-list étant par bloc, les morceaux de Rio Grande Blood seront également joués à la suite, là aussi ce sont les meilleurs morceaux, les plus puissants (et plutôt ceux du début de l'album également) qui seront joués. Déjà pour commencer le morceau éponyme qui ouvre l'album avec un sample de Bush ici présent, ainsi que Señor Peligro ou encore Lies Lies Lies. Bon tous les bons titres (ça représente quand même 80% de ces albums) ne peuvent pas être joués et tout à une fin... Et la fin, ici comme lors du concert à Budapest en 2006, sera avec Khyber Pass, ce morceau un peu spécial qui clôt Rio Grande Blood , avec ce côté un peu éthéré et arabisant, qui m'avait justement laissé perplexe. J'ai donc pu revoir cette vidéo un peu étrange où l'on voit Ben Laden dans ses montagnes afghanes tel un sage, ou un messie ? Bon je ne crois toutefois pas que Ministry nous fasse là une apologie de Ben Laden comme leader charismatique, l'album Animositisomina présentant une attaque contre les trois monothéistes et le groupe étant anarchiste, ou alors au final une éloge de Ben Laden pour avoir osé défier les USA (d'ailleurs le bassiste a un barbe très typé musulman), ou une critique malgré tout du fanatisme religieux (à mettre en parallèle avec le morceau Psalm 69). Je ne sais pas trop ; il me semble que Ministry est plutôt adepte de la théorie selon laquelle la lutte contre le terrorisme est une orchestration, un prétexte, pour mieux contrôler le peuple. Ce n'est pas là le sujet et vous trouverez sûrement des interviews qui peuvent lever le mystère.
C'est sans grande surprise que Ministry est revenu pour un rappel, qui s'imposait car partir (pour toujours qui plus est) sans jouer ses grands classiques serait une injure. Le premier morceau de ce rappel ne m'a vraiment pas paru pertinent puisqu'il s'agissait de So What, avec ses huit longues minutes, extrait de The Mind is a Terrible Thing to Taste de 1989, choix décevant vu le nombre excellent de bons titres dans cet album, mais il semble que ce soit un vieux classique du groupe, présent également sur le live In case you didn't feel like showing up. Enchaînement avec enfin des morceaux incontournables de l'album culte de Ministry, Psalm 69 avec NWO (premier morceau de l'album). Suivi de l'hymne du groupe Just one Thing avec le clip originel légèrement retouché et enrichi. Le mauvais choix de So What est ensuite effacé avec l'excellentissime Thieves de The mind, le fameux morceau avec ses bruitages de machines qui rythment le morceau et personnellement l'un de mes morceaux préférés de Ministry. Quelques morceaux de Psalm 69 n'auraient pas été de trop d'autant que Ministry est revenu pour un deuxième rappel assez inutile avec What a wonderful world de Louis Armstrong, triplement repris dans Cover up (oui en bonus caché là aussi dispensable) qui commence donc sur du piano, avec Al fumant sa clope, puis rejoint par le groupe, morceau qui semble clore les shows de cette dernière tournée et qui sera donc le dernier mot de Ministry. Alors après le trip Bush, place à un trip délire, car Cover up comme je le marquais dans ma chronique aurait plus eu sa place sous le nom de Revolting Cocks. Et marque donc une vraie transition vers Revolting Cocks (déjà entamé par le Rio Grande Dub) qui par ailleurs est très bon dans son style volontairement délirant. Dernier mot donc sous Ministry mais Revolting Cocks sera désormais mis au devant de la scène par Al qui finalement ne sera pas bien loin. Un excellent show d'une longueur tout à fait honorable, charismatique, apocalyptique et mémorable qui clôt donc (avant une éventuelle reformation, comme beaucoup) une carrière au sommet et qui nous montre ce soir encore par une ultime démonstration ce qu'est et doit être le metal indus. Et qu'il n'est que bien peu souvent, style qu'il a crée sans être jamais égalé...
Merci à Oliv' pour les photos. Plus de photos sur son site : www.photolive69.com