11/11/2015
Le Klub, Paris
Les dieux du doom ont fait trembler les murs du Klub, salle de concert culte du coeur de Paris et lieu idéal pour une telle cérémonie. Célébrant à la fois les dix ans de The Bottle Doom Lazy Band, les quinze ans d'Ataraxie et surtout la première venue dans la capitale de Lord Vicar, cette soirée historique a très vite affiché sold out. Bref, il y a ceux qui étaient là... et les autres !
Par rapport à ce qui avait été annoncé, l'ordre des groupes a été modifié. C'est donc à Barabbas d'assurer les préliminaires. La scène est trop petite pour le quintet et surtout pour son charismatique chanteur mais, contre toute attente, celui-ci s'installe au milieu de public, position finalement idéale pour lui, pouvant alors, à son aise, sortir le gros paquet. Comme toujours, Saint Rodolphe fait le spectacle, pour le plus grand plaisir du public, crachant sa bière sur certains d'entre nous (dont votre serviteur !), baptisant avec ce même breuvage les brebis égarées, ou bien collant son visage velu à celui des jeunes filles qui n'attendaient que ça (et peut-être plus ?). Derrière lui, les autres musiciens empilent les bûches et s'ils apparaissent décontractés, trop heureux d'être là, ils n'en sont moins précis et appliqués, notamment la (belle) paire de manches entre les paluches de Saint Stéphane et Thomas Bastide. Mais ni Saint Jérôme ni Saint Jean-Christophe ne sont en reste, martelant une rythmique de forgeron.'La beauté du diable', 'Judas est une femme' ou 'Le sabbat dans la cathédrale' comptent parmi les psaumes assénés par ce très bon groupe de doom qui ne ressemble finalement à aucun autre.
The Bottle Doom Lazy Band prend la relève. Autre groupe, autre style, autre doom. Le tee-shirt que porte fièrement le chanteur Bottle Ben, qui représente la délicieuse pochette du Love Hunter de Whitesnake est un indice qui ne trompe pas. Moins pachydermique que celle de Barabbas, la musique du groupe est davantage biberonnée aux seventies et au blues. (Trop) serrés les uns sur les autres, les mecs prennent leur temps pour dérouler un set qui mêle puissance heavy et flamboyance jouissive, à base de longues pulsations, puisant dans leurs deux albums, Blood For The Blooddking (The Dead Can't Loose Again...) et Lost N' Drunk (Too Old, Smiling Tomb...). Bien que composé de musiciens à l'attitude très différente les uns des autres, entre Bottle Ben, pied nu et un peu hippie, Hemreich (ex Angmar) et sa basse féroce ou Pierre aux postures de guitar-hero, le groupe a été convaincant. Un vrai plaisir de le découvrir sur scène.
Curieusement, ce n'est pas Ataraxie qui investit ensuite la scène mais Lord Vicar, la tête d'affiche. D'un coup, la salle voûtée se remplit. Le groupe débarque tranquillement sur la petite scène. Si la présence des Finlandais est déjà un événement en soi, le fait que la basse soit tenue ce soir-là et durant toute leur tournée européenne, par, excusez du peu, Sami Hynninen, rend ce moment encore plus précieux. Et encore plus culte. Car, ce n'est finalement ni plus ni moins que les deux tiers du défunt Reverend Bizarre qui se retrouvent devant nos yeux qui ne cessent de passer de l'un à l'autre. Christus au chant dont le pedigree laisse tout aussi rêveur (Saint Vitus, Count Raven, Goatess et Terra Firma) et l'ancien batteur de Centurions Ghost, Gareth Millsted, complètent ce line-up quatre étoiles que cimente une évidente complicité, notamment entre les deux anciens compères.
La performance livrée par Lord Vicar sera toute en ambivalence, à la fois décontractée et nerveuse, enjouée et ténébreuse. Reverend Bizarre, la guitare de Reverend Bizarre a des allures de burin cependant que le bassiste semble, lorsqu'il joue, totalement possédé. Moins mythologique sinon démesuré que celui façonné par Reverend Bizarre dont certains attendait peut-être une petite (?) reprise en guise de rappel, c'est un doom plus traditionnel mais tout aussi granitique qui prend corps dans ces entrailles parisiennes. Des extraits de Fear No Pain (Down The Nails...) et Signs Of Osiris (The Answer..) s'enchaînent jusqu'au point G incarné par l'immense The Funeral Pyre. Revenant sur scène le temps d'un court aperçu du prochain album à venir avec l'inédit The Green Man, Lord Vicar a été à la hauteur de l'attente et on se demande comment Ataraxie pour lui succéder...
C'est devant un parterre clairsemé que les Français prennent place avec la difficile mission d'achever cette soirée mémorable. Nous n'avions pas vu le groupe depuis la sortie de L'être et la nausée il y a deux ans déjà et c'est donc avec plaisir que nous le retrouvons régénéré par ces nouvelles compositions et un line-up à trois guitares, quand bien même Julien Payan, immobilisé par une jambe cassée ne peut s'exprimer pleinement. Le dernier album passe très bien, exécuté par des musiciens en forme malgré l'heure avancée et une salle à moitié vide. Mais les absents auront encore une fois tort...
Merci à Spiral Productions pour nous avoir permis de vivre cette soirée qui fera date.