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Celestia : Frigidis Apotheosia (Abstinencia Genesiis)

CELESTIA - Frigidis Apotheosia (Abstinencia Genesiis)

Apparitia Recordings / Drakkar, 2008

Black Metal, France

Album CD

Celestia , c'est un peu comme l'un de ces grands crus du Médoc, c'est raffiné, élitiste, et surtout, ça se bonifie avec le temps. Aussi modeste que soit mon avis, je peux vous assurer que 2008 sera une grande année! Mais avant d'aller plus loin, avant de cerner, tant bien que mal, ce Frigidis Apotheosia (Abstinencia Genesiis) , il me semble primordial de bien avoir à l'esprit qui a enfanté cette entité. Si de prime abord, nous avons plutôt tendance à dire que la musique n'est que le reflet de ces compositeurs, il me paraît préférable pour une fois de prendre cette assertion à contre-pied. Trop de groupes sont actuellement sans substance. Leur musique peut sembler appréciable à la première écoute, mais l'on se rend rapidement compte que ce ne sont que des illusionnistes, sans aucune identité et personnalité, totalement fades et vides de sens. Si la musique de Celestia a atteint un tel niveau, ce n'est qu'uniquement dû à l'intégrité de son géniteur, Noktu . Intégrité dans le sens où il n'a subi aucune altération, aucun dommage ou aucune diminution, malgré les agressions inlassables de notre société. Témoin de notre décadence, conscient que l'être humain a pris un mauvais tournant avec la culture symbolique et la division du travail, nous avons quitté un lieu d'enchantement, la Nature, de compréhension, de raffinement, de culture pour atteindre l'absence que nous connaissons aujourd'hui, notre incroyable dégénérescence. Vide, de plus en plus vide, les personnes conscientes de cet abrutissement sont en voie d'extermination, et pourtant, personne ne crie au génocide. C'est donc pour échapper à tout cela, à ce toujours plus, à cette hébétude croissante, que le seul maître à bord de cet unique groupe qu'est Celestia a décidé de s'isoler, de rompre les liens, son leitmotiv semblant être qu‘on est libre, intellectuellement parlant, qu‘une fois avoir tout perdu, matériellement parlant. Tel le héros de Thoreau, Walden, c'est dans la voie de l'abstinence que s'est enfoncé le personnage, et c'est cette voie, ce choix, qui a permis d'être ce qu'est Frigidis Apotheosia (Abstinencia Genesiis) , une œuvre unique, nostalgique de la grande époque. Huit morceaux, ou le maître mot pourrait être raffinement. Le connaisseur de Apparitia - Sumptuous Spectre ne sera pas totalement destabilisé, on retrouve sur cette nouvelle galette le même timbre de voix, si particulier, mais également cette même approche des riffs, comme sur A plaintive cry merely echo . Le son, ou tout du moins la production, est, a contrario, bien plus travaillé. Amateur, généralement, des productions très crues et froides en terme de black metal, je dois bien admettre que la musique de Celestia se devait de franchir cette étape. Production très léchée, elle permet de retranscrire au mieux l'ambiance voulue. Une ambiance qui d'ailleurs se voit grandement aidée par les couches de clavier de Malefic (unique membre de l'incontournable XASTHUR ), qui apporte une atmosphère singulière ( The seed of negation ), mais aussi presque empathique à certains moments, tel que sur le début de Admirable eros abstraction . Vouloir cerner totalement ces morceaux, c'est d'abord essayer de cerner le pourquoi, c‘est en ce sens qu‘il m‘a semblé important de rappeler quel chemin intellectuel avait été parcouru. Balayant avec une facilité déconcertante tous ces ersatz polluant cette scène black jusqu'à la rendre risible aux yeux des autres, Celestia ne s'est pas assis sur le trône avec cet album, il l'était déjà, il a juste stopper net tous ceux qui s'auto-prétendaient et s'auto-proclamaient appartenir à l'élite...

Caedes - 8,5/10