16/05/2007
L'Usine, Genève
Les soirées electro dark organisée par le Baron Von Smock du label Urgence Disk sont devenues depuis bien longtemps des références en proposant la plupart du temps des concerts de qualité dont certains sont (uniquement) friands. Depuis quelques temps, on sent une plus grande diversification. Les soirées proposent initialement des concerts electro, indus et gothic mais s'ouvrent clairement à des sonorités bien moins électroniques pour la partie concert (pensons à Dark Sanctuary) et ce soir au registre dark folk.
Spiritual Front avait ce soir la lourde tâche d'introduire la partie live de ce énième electrodark. Lourde tâche car le public était fort varié et pas forcement rattaché à leur cause, du moins en ce qui concerne la musique. Car à n'en point douter, au niveau des textes les batcaveux venus pour la deuxième partie ne furent pas déçus. Bien qu'ils se définissent eux même comme de la « nihilist suicide pop », je préfère l'étiquette pop décadente car musicalement proche de Decadence Current 93 ou encore d'un Ordo (Rosarius) Equilibrio. Une petite remarque sur le public au passage. Hormis les sempiternelles deux ou trois chieuses qui crient à tous va et qu'on commence à s'habituer de voir sur ce type d'évènement, il est intéressant de noter qu'il fut très diversifié, allant du metalleux au curieux en passant par le goth de base. Et ce soir la gente féminine fut assez bien représentée, sûrement à cause des " charmes du beau " Hellvis plus qu'aux mots crus et décadents du chanteur. Les textes sont très crus et libidineux, souvent faisant l'apologie du sexe et de la décadence. C'est assez surprenant quand on voit le nombre de groupies attachées aux santiags de Simone Salvatori alias Hellvis. De plus, la plus grande accessibilité de leur dernier album Armageddon Gigolo ne fait qu'accentuer ce phénomène. Mais il était important de le noter à l'image de ma voisine toute excitée. Spiritual Front débarque donc, costumes de pasteurs, cheveux gominés, micro rétro chromé et projection d'ambiance. L'ensemble du set très cohésif dégage une atmosphère pesante, mélange entre westerns modernes et de cabaret-bordels enfumés. Le répertoire de ce soir ne fût pratiquement tiré que du dernier album, à savoir Slave, Bastard Angel, I Walk the (Dead)Line, Jesus Died in Las Vegas, Cruisin', Ragged Bed et No Kisses on the Mouth. Deux titres du très bon split Satyriasis : Somewhere Between Equilibrium and Nihilism avec Song for the Old Man et Autopsy of a love, puis Cold Love in a Cold Coffin de Bedtime / Badtime. Finalement il me semble avoir reconnu We Could Fail Again de l'album Nihilist Cocktails for Calypso Inferno. Toutefois à peine une heure de show et aucun rappel malgré l'insistance du public, les romains furent hélas un peu avares.
Jacquy Bitch prend la relève. Comme il est de coutume, une partie de public n'est venu que pour l'étiquette, avouons-le bien à la mode de " batcave " (ou " true goth " si l'on peut dire), Jacquy Bitch est cependant bien loin d'être une jeune formation. Il s'agit du projet solo de l'ancien membre de Neva, débuté en 1991 après le split du groupe batcave. Certes Jacquy Bitch n'a pas sorti grand chose pendant toutes ces années (deux démos cassettes albums qu'il serait bien de rééditer en CD,et deux albums) mais il est toujours resté là fidèle à la scène gothique sans en devenir une des références. Pourtant il le mériterait. Pour ma part, c'est la troisième prestation à laquelle j'assiste et c'est toujours un plaisir de revoir Jacquy Bitch sur scène. Changement total de line-up sous forme de trio, apparition d'une nouvelle bassiste camionneuse post-punk Kathy, de Chyme à la guitare et Jacquy au chant et à la guitare avec un look pas trop excentrique cette fois-ci. Un line-up qui aura duré deux ans puisqu'en juin il a encore changé, se stabilisant en septembre avec deux membres liés à Brotherhood Of Pagan. Le décor de fond est assez étrange avec l'image de Robert Smith des Cure sur les amplis car cela pourrait faire penser à un groupe de fête de la musique qui rend hommage à ses influences. Pourtant Jacquy à son niveau n'a plus rien à prouver avec son gothic batcave à boîte à rythme et programmations, son chant particulier et efficace. Etrange démarche qui peut-être signifie juste un retour aux sources, même si musicalement on ne peut pas dire que Jacquy ressemble à du Cure. Mais peut-être cela est-il un appel aux gothiques " puristes " revendiquant sans cesse leur attachement aux premiers Cure (dont on ne peut nier la qualité)... Bref, cette troisième prestation n'était aucunement de trop, puisque Jacquy n'a en fait proposé quasiment que des nouveaux titres extraits de l'album alors à venir Stories from old years qui au final n'est sorti que le 31 octobre (probablement fait exprès) et se révèle vraiment très bon. Quasiment tout l'album a été joué puisque les titres suivants ont été joués : Voyage, L'adieu, Mjolnir, Détresse, Les enfants damnés, Louchald, Cimetière (dans chaque album un titre porte un nom très proche...), My friends, Vision, Birdy et Indifference. En ce qui concerne les autres enregistrements, on notera deux morceaux du précédent album La haine sorti en 2003 avec Death et Intro (qui porte très mal son nom puisque ce n'est pas un instrumental mais un morceau normal de longue durée, si ce n'est qu'il est le premier de La haine (manque d'inspiration ?). Pour finir la prestation, un morceau au titre non identifié Couloir fou qui est peut-être un clin d'oeil au Couloir sans retour (sur Les mains du mal ?). Certains bribes de morceaux se ressemblent parfois (pensons à Cimetière). Donc pas de titre du très très moyen Coram et c'est tant mieux même si un ou deux morceaux sont bons. Une très bonne prestation, peut-être la meilleur des trois, simple et efficace (celle de 1997 était marqué des guignoleries, celle de 2005 par un prob technique sur les programmations) avec un bon contenu musical même si évidemment de vieux titres de leur période cassettes auraient été les bienvenus pour un rappel...
La soirée se terminera par une performance visuelle des membres du groupe FAKIR, déjà en activité entre les deux groupes. Performance constituée de suspension avec la particularité d'être directement attachés à des anneaux accrochés dans le corps tirant directement sur la peau. Les performances proposées dans les milieux gothiques sont souvent très clichés et faussement subversives. Avouons que celle-ci était intéressante même si une fois la suspension réalisée le clou était passé. Mais bon, il s'agissait ensuite d'observer la durée de suspension par la peau et donc de la douleur qu'on imagine fort bien. Une méditation donc sur la maîtrise de la douleur par le biais de ces deux hommes et de cette femme multi-percés et implantés, intéressant...