16/11/2007
Bikini Test, La Chaux-de-Fonds (Suisse)
Dure dilemme que cette soirée, puisqu'il a fallu choisir entre le concert d'Envy, très bon groupe japonais de post-core, rarement de passage par chez nous et Gorgoroth dans cette autre canton de la Suisse. Mais d'un côté comme de l'autre, il fallait faire un sacrifice et aucun regret de part et d'autres puisque la Horde Noire s'est dédoublée ce soir-là... Bien-sûr ce dilemme n'existait pas chez la plupart des adeptes les plus ciblés de chacun des deux groupes... D'ailleurs le concert affichait sold out quelques jours à l'avance... Il faut aussi dire que Gorgoroth au Bikini Test , qui fût aussi l'occasion de fêter les 15 ans de la salle, ce n'est pas de l'inédit... 2 ans après un premier passage, Gorgoroth revient donc au Bikini Test en collaboration une fois encore avec l'association de Franche Comté Corona Infernalis... On se rappelle en effet, il y a deux ans, d'une réussite au-delà des espérances, qui avait d'ailleurs conduit à un afflux massif excessif conduisant à un sold out très rapide et au refus de bon nombre de personnes parfois venant de loin. Cette fois-ci, aucune vente ne se faisait à l'entrée et les préventes étaient obligatoires. Ce retour de Gorgoroth survient dans un contexte très particulier puisque le groupe a splitté peu de temps avant, avec Infernus le fondateur d'un coté et King et Gaahl de l'autre qui poursuivent la tournée européenne, les deux putschistes s'empressant de s'assurer la pérennité du groupe en imprimant de nombreux t-shirts à leur effigie. Après coup, il semblerait qu'au final il en soit autre... C'est donc une tournée très particulière sous le nom de Gorgoroth.
C'était 1349 qui avait accompagné Gorgoroth la dernière fois, les revoici en compagnie d'un groupe culte de black avec les belges d'Enthroned et avec pour ouvrir les nouveaux venus de Tyrant au patronyme déjà bien usité. Le groupe suédois s'est formé tout récemment et a seulement à son actif un premier album Reclaim the flame, 10 titres d'à peine 30 minutes sorti 2 mois avant sur le label français Listenable qui permettra donc d'assurer leur courte prestation. Par-contre, ce que je ne savais pas à ce moment là et qui explique leur présence sur cette tournée de maîtres, c'est que les membres de Tyrant, malgré la banalité du pseudonyme, sont loin d'être des inconnus. Le groupe comporte deux membres communs de The Black et des excellents Vinterland, un membre de Dellamorte, mais surtout et très incroyablement Peter Bjärgö, le leader d'Arcana, le groupe de référence en dark atmospheric et Sophia (indus martial) qui donc renoue avec ses racines metal lointaines du temps de Crypt of Kerberos, qui étonnement vient de reprendre ses activités... Je dois dire que c'est en rédigeant cet article et en me renseignant sur le groupe que j'ai découvert cette présence. Car je n'ai vraiment pas reconnu Peter à la guitare, malgré un passage en Suisse une année et demie auparavant avec Arcana... Enfin tout cela explique donc pourquoi malgré la banalité du pseudo, du concept et de la musique, cette prestation s'est révélée vraiment efficace avec un black / thrash old school et lourd avec une légère touche rock n'roll bien dosée pour une fois, puisqu'étant avant tout un hommage aux racines de ce style, rappelant clairement Celtic Frost par le son et le chant, Bathory époque deuxième et troisième album par les compo, voir Entombed, notamment par le chant. En général, les groupes hommage aux vieux black sont souvent clichés, pathétiques, rarement de qualité ou intéressant. Ce qui n'est pas le cas ici. Les musiciens étaient également très à l'aise et simples avec des compositions vraiment efficaces malgré un public sage... Ainsi sans m'en douter cette prestation s'est montrée à la hauteur de leurs protagonistes en fait bien rodés qu'alors je n'avais pas identifié, je vous invite donc à découvrir cette nouvelle formation.
Je ne peux pas en dire autant des belges d'Enthroned qui m'ont réellement déçu pour un groupe si ancien et si réputé dans le black metal. Certes, je ne saurais dire quels morceaux ont été joués, ayant suivi la carrière du groupe un peu de loin. Disons que je ne saurais identifier les titres, qui, il faut l'avouer, ce soir-là se ressemblait un peu tous. La seule chose que je puisse affirmer, c'est que le premier album Prophecies of pagan fire n'a pas été honoré et que beaucoup de morceaux du dernier ont été joués. Et puis tout comme Gorgoroth, les conflits entre les membres sont d'actualité, Sabathan le chanteur d'origine ayant été viré en 2006, c'est donc Nornagest qui a pris le micro sur le nouvel album Tetra karcist. Toutefois le registre vocal des deux chanteurs n'est pas du tout le même, il s'agit ici d'une plus grosse voix. Le groupe semblait motivé, et ne pas manquer d'inspiration mais j'ai trouvé cette prestation assez fade, plus axée sur le côté bourrin, et manquant cruellement de charisme, et ce ne sont pas les remarques et mimiques gros méchant du chanteur qui allaient y contribuer : " Hey, p'tit con, tu commences à me courir sur le haricot " ?!? Décevant pour ma part, après niveau maîtrise et brutalité, le groupe a pleinement assuré et a convaincu et satisfait le public, c'est certain. Mais bon il n'était pas à la hauteur de ce que j'attends d'un groupe de référence en matière de black metal.
Le charisme c'est bien ce qu'il ne manque pas à Gorgoroth. Et il est vrai que l'absence d'Infernus ne s'en est pas faite remarqué, King et Ghaal revendiquant les rênes de Gorgoroth. Il faut avouer que cette prestation était imposante, pas plus certes qu'il y a deux ans mais pas moins non plus... Peut-être que la mise en scène très soignée en imposait un tout petit peu moins qu'il y a deux ans, avec toujours des cierges disposés sur la scène mais pas d'immenses croix renversées destinées à être incendiées cette fois-ci... Ce petit détail n'affectera en rien la qualité de la prestation, autant dire de toutes les prestations de black metal qu'il m'a été donné de voir, jeunes groupes intègres ou références. Celles de Gorgoroth correspondent le plus à ce que doit être une prestation visuelle de black metal à tous les niveaux, en passant par un look parfait, King arborant un style pour le coup bien sombre, évitant ainsi les maladresses typiques du black metal pathétique. Ou par le rôle de frontman réellement black metal de Gaahl évitant toute communication avec le public (on est bien loin de Satyricon et de son côté festif, ou des remerciements enflammés de Legion) si ce n'est brandir des mains cornues, et aucun rappel tout comme la dernière fois, avec un départ peut-être moins soigné (la dernière fois les cierges étaient laissés fumant). Ou encore la perfection de chaque musicien à son niveau, se passant des tournoiements stupides de cheveux, se contentant d'un leger headbanging et de regards plutôt fixes et froids, voir volontairement figés pour Gaalh. Car le vrai black metal est une musique certes violente mais froide également. On notera par ailleurs un remplaçant d'Infernus qui étrangement semblait être un sosie de Gaahl (comme Saddam Hussein et ses sosies ?!?) et la présence de Nicolas l'ex-batteur de Cradle of Filth, passé également dans Dimmu Borgir, et donc assez logiquement remplaçant dans un autre gros groupe de black. En ce qui concerne le contenu musical, assez logiquement peu de vieux titres pre-Gaahl : Possessed by Satan du second album Antichrist, et surtout des titres du très bon Under the sign of hell (le premier album chez Nuclear Blast) avec l'enchaînement de The Rite of Infernal Invocation et du folkorique Profetens åpenbaring ainsi que Revelation of doom pour achever la prestation. On notera également un seul titre de Destroyer avec le très bon morceau éponyme, seul morceau chanté initialement par Gaahl sur cet album. Le contenu principal est donc constituer des trois derniers albums, l'album Twilight of the Idols ouvrant la prestation avec les morceaux Procreating Satan et Forces of Satan Storm. Plusieurs morceaux sont tirés évidemment du dernier album en date Ad Majorem Satanae Gloriam avec Carving a Giant, Wound Upon Wound, Prosperity and Beauty et le très bon et lancinant Sign of an Open Eye. Ce dernier donna l'occasion d'un éclairage rouge fixe sur un Gaalh figé lors de la narration. Nous avons aussi droit à des morceaux d'Incipit Satan avec le titre éponyme et When Love Wild Rages in My Heart. Je conclurai comme il y a deux ans : à Gorgoroth en live version 2007, c'est toujours une démonstration de ce que doit être le black metal. Après qu'adviendra-t-il de Gorgoroth ? Avouons que King et Gaahl sont imposants et que leur putsch est séduisant au premier abord. Mais bon, il bafoue clairement le sens de l'honneur qu'on est en droit d'attendre du black metal. En tout cas à Gorgoroth était ce soir encore, malgré l'absence d'Infernus, au sommet comme il y a deux ans...