Debemur Morti, 2007
Hooligan Black Metal, France
12' LP
Heureuse initiative de la part de Debemur Morti que de publier en double vinyle cette rétrospective déjà culte d'une horde qui ne l'est d'ailleurs pas moins, Peste Noire. Prévu originellement en 2006 puis disponible en format cassette, Mors Orbis Terrarum creuse une excavation (quasi) complète dans le parcours du groupe de sa naissance en 2001 avec la démo Aryan Supremacy (quel alléchant programme !) jusqu'à \"L'hymne en l'honneur de la peste\" de Pouchkine en 2004.
La première partie se concentre sur les démos Mémoire paienne (2002) et Macabre transcendance (2002), complété par le titre \"Retour de flamme\", soit un raw black metal fiévreux, bouillonant, au son pollué, qui sent le souffre et le stupre. Rarement un groupe aura aussi bien su exalter les ténèbres, les forces noires. Un goût d'interdit se dégage de ces bubons dont on a vraiment l'impression qu'ils ont été enfantés dans un caveau humide par un groupuscule habillé de costumes noirs.
Bien que sales et malfaisants, ces hymnes recèlent pourtant une vraie beauté obscure, une poésie macabre (ce n'est pas pour rien que les paroles de \"Le joyeu mort\" et de \"Spleen\" sont inspirées de Baudelaire) à l'image du superbe \"666 millions d'esclaves et de déchets\", dont les passages mélodiques sont comme une balise dans cet univers de décrépitude humaine. Car la grande force de Peste Noire réside dans cette capacité, en dépit du nihilisme, de la haine qui suintent des textes vomis par La Sale Famine de Valfunde, en dépit de la laideur revendiquée, de savoir toujours demeurer accrocheur (tout est relatif bien entendu !). Chant écorché et douloureux, riffs grésillants et dégueulasses comme le sang des menstrues forment le substrat d'un Art noir totalitaire obsédant et venimeux, véritable appel à prendre les armes contre le conformisme gangrenant une société que l'humanisme et le cosmopolitisme rongent comme une lèpre.
Le second disque regroupe la démo Phalènes et pestilence – Salvatrice averse (2003), que mine une tristesse infinie, un dégoût de l'Autre absolu et sur laquelle plane le spectre du grand BURZUM, période Filosofem (la meilleure !). C'est beau à vous foutre des frissons avec ces chants grégoriens hantés, ces ambiances funestes et ces soli envoûtants. L'épidémie s'achève par deux incantations très longues et sublimes, \"Deuil angoisseus\" et \"L'hymne en l'honneur de la peste\" de Pouchkine. Peste Noire est La définition même du black metal, celle qui aurait toujours dû le guider.
Mors Orbis Terrarum permet donc de suivre le cheminement artistique, d'un metal noir primitif à une musique plus atmosphérique bien que toujours aussi fielleuse, d'un groupe qui fait honneur à un genre que l'on ne peut prétendre aimer si l'on ne connaît pas ce commando.