Brutal Death Metal, France
01/07/2020
Benighted qui sort un album, c'est toujours un gage de qualité en matière de brutal deathgrind . Nous en profitons à la Horde Noire pour poser quelques questions à Pierre Arnoux, bassiste de la formation .
1/ Salut Pierre , tout d'abord merci de répondre à mes questions pour la Horde noire . Votre dernier album, " Obscene Repressed " est sorti depuis avril . Quels ont été les retours de la presse et des fans pour ce chef-d'oeuvre de brutalité ?
Salut ! Les retours semblent incroyablement positifs et unanimes. Je crois que nous avons réussi à condenser dans cet album tout les ingrédients nécessaires à un bon album de Benighted : de la brutalité, de la variété, du groove, des refrains “catchy”, du grind, du death, du black, du hardcore... C'est probablement notre album le plus fédérateur.
2/ Entre la musique, les paroles et l'artwork, vous avez su créer tout un concept d'une homogénéité remarquable . C'était le but dès le début ? Pourrais-tu nous en dire plus sur l'intrigante histoire de ce jeune garçon qui est le protagoniste principal de cet album ?
Oui, nous essayons toujours d'avoir une cohérence entre la musique, le visuel et l'histoire racontée. Vu la musique que nous jouons, tu te doutes bien que nous ne parlons pas de papillons, d'arc-en-ciel et de petits poneys. Enfin si, on pourrait, mais ce serait forcément tordu... Ceux qui connaissent Benighted savent que Julien aime raconter des histoires horrifiques basées sur des pathologies psychiatriques, tout simplement car il est infirmier en psychiatrie et fan de films d'horreur. "Obscene Repressed" ne déroge donc pas à la règle. Le concept de cet album est basée sur l'histoire de Mickael, un enfant qui est né avec une fente labio-palatine qui le rend repoussant aux yeux de sa mère, qui nourrit des sentiments paradoxaux à son égard. En grandissant dans cette ambivalence amour/rejet, Mickael finit par croire que son père l'a volontairement créé ainsi afin de le rendre laid aux yeux de sa mère pour que celle-ci ne l'aime pas. Ce délire paranoïde le pousse à passer à l'acte, en coupant sa difformité et la donnant à manger à sa mère, sans que cette dernière ne s'en rende compte. Une manière de retourner dans le ventre réconfortant de maman en quelque sorte... Finalement, c'est une histoire d'amour, à la sauce Benighted. Robert Borbas aka Grindesign a parfaitement su mettre en image les angoisses oedipiennes et paranoïdes de Mickael sur la cover.
3/ Depuis l'excellent " Necrobreed ", et l'arrivé de Manu en tant que guitariste /compositeur mais également de Kevin Paradis juste après, qui figure dans mon top trois des batteurs d'extrême, considères-tu que Benighted n'a jamais été aussi bien armé pour les prochaines dates et albums ?
Chaque line-up a apporté une pierre à l'édifice et fait du groupe ce qu'il est aujourd'hui. C'est toujours difficile de voir un membre partir, mais nous avons une chance incroyable en ce sens que chaque arrivée a enrichi le groupe. Donc oui, pour répondre à ta question, Benighted n'a sans doute jamais été aussi fort sur scène et sur album qu'avec le line-up actuel. Manu et Kévin permettent de rendre notre musique techniquement plus intéressante, sans toutefois sacrifier ce qui fait l'essence de notre musique, à savoir l'énergie et la brutalité. Ce sont des musiciens exceptionnels.
4/ L'imagerie et le côté cinématographique du groupe se développent toujours plus au fil de vos 20 ans de carrière. Je compare souvent votre discographie à une série comme American Horror Story où chaque album serait une saison...Auriez-vous un jour l'envie de faire un court métrage avec en bande son votre musique ? Le 7ème art semble être une source d'inspiration au même titre que le boulot de Julien pour les paroles , non ?
C'est une idée qui nous a déjà effleuré l'esprit en effet, ce serait génial. Le cinéma d'horreur a en effet une influence énorme sur notre musique et le visuel qui en découle. Comme tu l'as remarqué, les concepts créés par Julien sont écrits comme des scénarios, avec plusieurs niveaux de lectures. J'invite d'ailleurs tout le monde à se pencher dessus, car c'est vraiment très riche, beaucoup plus que ce que l'on pourrait croire. En revanche, faire un court ou moyen métrage demanderait des moyens que nous n'avons pas pour le moment, c'est un travail énorme. Mais si un jour cela devient possible, les gars de Kick Your Eyes seraient sans doute ravis de se lancer dans une telle aventure avec nous.
5/ Le Warm up du hellfest a été annulé pour les raisons que l'on connaît mais vous venez d'annoncer finalement la tournée pour promouvoir votre nouvelle album à partir du 3 octobre, si la situation sanitaire le permet. J'imagine que tu dois en être heureux ?
Ça a été une énorme déception de ne pas pouvoir faire cette tournée qui nous aurait donné accés à des salles qu'un groupe de death/grind ne peut pas fréquenter habituellement. Quelle frustration de ne pas pouvoir assurer la promotion de "Obscene Repressed" que nous considérons être notre meilleur album. Donc oui, si la tournée d'octobre peut se concrétiser, nous en serons extrêmement heureux. Nos bookers Ronny et Charles ont travaillé d'arrache-pied pour monter cette tournée, dans l'urgence et dans des conditions très compliquées. J'espère vraiment que cela va pouvoir se faire, retrouver la scène et le public, c'est notre raison d'être. Pour le coup, ça va être bien plus underground que la tournée Warm-up Hellfest, mais on s'en fout, on veut juste jouer et faire la fête avec nos potes.
6/ Pour rester sur les concerts, vous avez avec plus de 20 ans de discographie une multitude de morceaux pour le live. Comment faites-vous pour choisir entre anciens et nouveaux titres ? Par exemple combien de morceaux du nouvel album pourraient y être inclus ?
On essaye toujours d'équilibrer les set-lists entre nouveautés, “hits” et vieilleries, avec comme constante de ne pas perdre en intensité durant le set. En général, quand on sort un nouvel album, on essaye d'inclure 4 ou 5 nouveautés, en fonction de la durée du concert. Avec le temps, on sait quels morceaux marchent le mieux sur scène, et quelques “classiques” finissent par se détacher sur chaque album. Nous favorisons naturellement les morceaux des albums les plus récents car ils correspondent mieux à ce que nous voulons jouer actuellement, mais nous prenons toujours plaisir à jouer un bon vieux Collapse ou Foetus. Une chose est certaine, nous ne pourrons jamais satisfaire tout le monde à 100 %.
7/ La formule magique de Benighted serait-elle : une base de brutal death, un soupçon de hardcore, une pincée d invité plus prestigieux les uns que les autres, du chant en Français sur les chansons éponyme depuis "Insane Cephalic Production " , des passages où le public pourra scander les paroles ?
Nous n'avons pas de formule à proprement parler, nous n'appliquons pas la même recette d'album en album car ce serait le meilleur moyen de lasser notre public. Nous nous efforçons de structurer chaque morceau sans schéma prédéfini, en revanche nous essayons toujours d'obtenir la structure la plus efficace tout en mettant quelques surprises par-ci par-là. L'idée, c'est que chaque titre ait son identité propre et que l'auditeur puisse en retenir quelque chose. Mais comme tu l'as noté, on retrouve quelques gimmicks d'album en album, comme les titres en français et les invités. Tant que cela sert la musique, on continue !
8/ Parlons des nouveaux invités sur cet album, à savoir Sebastian Grihm ( Cytotoxin), Karsten Jäger ( Disbelief ) mais également Jamey Jasta ( Hatebreed) . C'est à l'écriture des paroles que vous pensez à faire intervenir tel ou tel personne ? Sur un morceau comme " Implore the Negative ", qui est sans doute la chanson la plus hardcore de l'album, le choix était assez clair pour vous du coup ?
En effet, lorsque Julien commence à travailler les lignes de chants, avant même l'écriture des textes, il imagine rapidement quel type de voix pourrait convenir à tel ou tel passage. Par moment, il se surprend à “imiter” un chanteur et il se dit que tant qu'à faire, autant demander à celui-ci de venir pousser la gueulante sur l'album plutôt que l'imiter. Parfois, c'est simplement pour apporter une tessiture et une dynamique différente. Au delà de ce que cela apporte musicalement, c'est aussi très intéressant quand on aborde des thèmes comme la schizophrénie. En ce qui concerne Jamey, oui c'était une évidence, mais encore fallait-il arriver à le contacter et à le convaincre. Heureusement, Julien a trouvé un moyen de le contacter, et à notre grande surprise il a accepté immédiatement et sans contrepartie. Ce mec est un vrai passionné.
9/ La scène death metal se porte particulièrement bien je trouve, avec des très bonnes sorties. Notamment en France où on voit émerger des formations qui vous citent comme référence....Il y a 20 ans on vous aurait dit ça tu l'aurais cru ? C'est une fierté pour toi j'imagine ?
On ne pouvait pas imaginer quand on a commencé à faire de la musique qu'un jour nous partagerions la scène avec des groupes qui nous ont donné envie de faire cette musique, et pourtant c'est le cas... Savoir qu'aujourd'hui nous sommes une influence pour de jeunes groupes, outre le fait de nous faire sentir vieux, c'est une grande fierté en effet, il n'y a rien de mieux pour conserver l'envie de faire ce que nous faisons, c'est un vrai moteur.
10/ C'était la cinquième interview d'un membre de Benighted pour la Horde noire, un dernier mot pour tout les fans de musique extrême du webzine ?
Merci de nous soutenir de plus en plus nombreux, album après album, année après année. Nous espérons vous retrouver tous très vite, et faire la fête avec vous, parce que vous nous manquez bordel !